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mardi, 12 octobre 2010

Le sacrilège est-il passible d'une condamnation dans la République ?

1330595612.jpgPar Coclès

La Droite strasbourgeoise

La vidéo de cet internaute de Bischheim qui brûle un exemplaire du Coran avant d'uriner sur les flammes a provoqué un tollé parmi les musulmans alsaciens. Elle est toujours visible sur le Net.  Le délégué général de la mosquée de Strasbourg a annoncé son intention de porter plainte pour incitation à la haine raciale. Le parquet a suivi. Le prévenu, provocateur assurément, risque 3 années de prison.

Dans l'atmosphère qui prévaut ces temps-ci en Alsace où le vandalisme funéraire alterne avec les agressions visant des juifs ou des musulmans, on se plaît à mettre dans le même sac délits racistes et sacrilèges.

Une loi concordataire prévoit, c'est vrai, trois ans de prison pour de tels faits. Mais d'une part, elle est tombée en désuétude depuis des lustres et, d'autre part, on ne sache pas que malgré les efforts constants que font certains pour inclure l'islam dans le concordat, il soit au nombre des quatre confessions protégées par lui. Si par malheur il y était inclus on voit par avance l'usage qu'il ferait de ce privilège.

La qualification "raciste" d'un tel acte témoigne de la confusion des esprits. Sauf le respect que l'on ne doit pas aux névrosés obsessionnels  qui voient le racisme s'infiltrer partout, on ne savait pas que l'islam, religion universaliste, témoignait de l'appartenance de ses membres à une "race" particulière (qui par ailleurs n'existe pas comme nous le répète une rumeur insistante).

S'en prendre à des musulmans, des juifs, des chrétiens et des athées ou profaner leurs tombes, cela peut effectivement relever du racisme, mais s'en prendre au Coran, à la Torah ou aux Évangiles ne relève en rien d'un quelconque racisme et ne saurait tomber sous le coup de la loi.

Critiquer un groupe ethnique, essentialisé pour ce faire, à raison de son apparence, de ses origines, de ses moeurs ou de ses croyances, ce n'est pas la même chose que de soumettre une religion à l'examen critique, voire de ridiculiser ses croyances, et les catholiques en savent quelque chose, eux qui sont pris pour cible chaque jour que Dieu fait par tout les faux rebelles (qui ne s'en prennent qu'à ce qui est déjà à terre).

En disant cela nous ne prenons pas le parti de l'internaute Bischheimois dont nous trouvons le geste d'autant plus déplacé qu'il le met au niveau d'un vulgaire taliban ou de ce pasteur américain cinglé qui défrayait la chronique il y a une dizaine de jours (on se demande bien pourquoi d'ailleurs). Nous ne faisons que nous interroger, car enfin admettre le caractère sacré du Coran, c'est admettre celui de la Bible, de la Torah, puis pour faire bon mesure, afin de ne pas exclure ce qui serait discriminer, du Bhagavad Gita, du Livre des Morts, et pourquoi pas de l'Iliade, du Capital, ou du Da Vinci Code...

"La liberté de croire ne saurait arrêter celle de se moquer." (Elisabeth Lévy). La République, tant qu'elle est laïque, n'a pas à se soucier du caractère sacré ou non d'un livre. Pour elle, ils se valent tous et c'est à chacun, en son for intérieur ou publiquement, d'en évaluer la pertinence. Si il fallait conserver une seule chose dans l'héritage des Lumières ce serait bien cette conquête qui est à l'origine de nombreuses libertés concrètes.

Les musulmans se disent outragés par le geste de ce jeune homme comme ils le furent par les caricatures de Mahomet. Mais son autodafé ne relevant ni de la haine, ni du racisme, c'est au nom d'un blasphème qui ne dit pas son nom qu'on l'inculpe. Un délit qui n'existe pas dans notre République, et c'est heureux.

En France les religieux de tout acabit ont fini par se faire une raison et les musulmans qui rechignent, c'est le moins qu'on puisse dire, à cette acceptation témoignent certes de leur fidélité à leurs moeurs mais non de l'esprit républicain de tolérance auquel ils se disent soit disant attachés. Il serait grave qu'à force d'extensions démesurées du concept de racisme on en vienne à accepter d'inclure dans sa définition des actes et des pensées qui ne tombent que sous le coup du mauvais goût, de la provocation et de la stupidité.

La République s'apprête-elle à des "accommodements raisonnables" pour faire leur place à des concessions dont personne ne sait où elles s'arrêteraient ? On sait trop bien que sur ses terres historiques l'islam punit de mort ceux qui prennent des libertés avec le Coran et son prophète et ce n'est pas demain la veille que l'on y reconnaîtra le droit au blasphème.

Si l'islam en France veut devenir l'islam de France, il faudra bien qu'il s'y fasse. Dans cette affaire le profanateur déclare : "On est en France et on peut brûler un livre de Winnie l'ourson comme le Coran" et l'autorité musulmane de rétorquer : "Si on ne réagit pas on autorise les gens à brûler un livre saint." Un véritable dialogue de sourd qui témoigne d'un décalage de civilisation.

La France pourrait être une chance pour l'islam. Une opportunité pour qu'il s'adapte à la société moderne dans ce qu'elle a de moins contestable.

Après l'affaire du chevalier François-Jean Lefebvre de La Barre, exécuté pour avoir mutilé une statue du Christ, il a fallu aux catholiques 150 ans pour s'adapter aux conditions de la modernité, et ceci aux prix de rudes combats. L'islam débarque dans un monde constitué qui semble douter de ses valeurs, où tout combat pour la laïcité apparaît comme une exclusion et un racisme. Bien sûr,  aucun croyant n'aime voir son credo ridiculisé ou ce qu'il tient pour sacré, profané. C'est pourtant le prix à payer pour recevoir le baptême républicain. Les juifs, les protestants, les catholiques sont d'accord là dessus. L'islam devrait-il faire exception ?

 

PS : on lire avec profit l'excellent article paru dans Causeur sur ce sujet brûlant.

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