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samedi, 20 février 2016

L’incompréhensible islamophilie des élites

 
 

Depuis trois jours, Kamel Daoud ne décolère pas. Dans le journal Le Temps tout comme dans Le Quotidien d’Oran pour lequel il écrit, le journaliste algérien affirme qu’il va jeter l’éponge, fatigué des menaces de mort des islamistes, mais peut-être plus encore des critiques de ses confrères français. Certains d’entre eux lui ont vivement reproché les tribunes qu’il a rédigées à la suite des agressions de Cologne, tribunes dans lesquelles il s’interrogeait sur le rapport à la femme et « la misère sexuelle dans le monde arabe ». Un collectif d’intellectuels n’avait pas hésité, le 11 février dans les colonnes du Monde, à l’accuser « d’alimenter les fantasmes islamophobes ». Parlant de procès stalinien et même d’Inquisition, Kamel Daoud s’interroge désormais sur les motivations de ces donneurs de leçons occidentaux. Il est vrai que leur attitude a de quoi surprendre.

Le pouvoir spirituel en Occident est, en effet, détenu depuis au moins cinquante ans par des gens dont la passion principale est l’antichristianisme, par une élite intellectuelle et économique qui s’emploie à déconstruire méthodiquement tout ce que le christianisme a construit, et plus largement, pour reprendre la formule de Bernanos, qui conspire « contre toute forme de vie intérieure ». Or, pour justifier cette rage destructrice, ces « athéocrates » n’ont eu de cesse que de reprocher au christianisme sa présumée haine des femmes et des libertés individuelles, ou encore sa prétendue violence historique. Ainsi, dans le prolongement de la philosophie des Lumières qui leur sert de dogme sacré, ont-ils fait de l’Inquisition le symbole de la violence et de l’arbitraire judiciaire alors même que ledit tribunal était le seul à n’utiliser que rarement la torture, à l’encadrer très strictement et à prendre en compte les droits de la défense.

Cette dénonciation systématique de la violence, de la misogynie et des atteintes aux libertés individuelles aurait dû tout naturellement conduire ces bonnes âmes à lutter contre l’islam avec une énergie décuplée. Le pouvoir exercé par le pater familias, la condition des femmes, le refus de la liberté de culte, la persécution des minorités, la condamnation à mort des blasphémateurs et des apostats, des femmes infidèles et des homosexuels, les châtiments corporels et les mutilations prévus par la charia, le pouvoir politique ou judiciaire des religieux, la notion de guerre sainte, la biographie de Mahomet, l’histoire de la conquête musulmane et des califats, ou même simplement l’importance accordée à la prière répétitive ou le primat de la foi sur la raison auraient dû provoquer une terrible aversion chez les disciples de Voltaire et Rousseau, dès lors que l’islam s’oppose presque point par point à tout ce qu’ils adulent. Et pourtant, les procureurs du libéralisme économique ou sociétal font preuve, à son égard, d’une invraisemblable mansuétude.

Comment expliquer un tel paradoxe ? Kamel Daoud y voit un relent du sentiment de supériorité hérité de la colonisation, de la conviction que les valeurs de l’Occident sont tellement universelles que même les islamistes y adhèrent forcément. On peut y voir, au contraire, le signe d’un sentiment d’infériorité et d’une belle lâcheté : c’est tout de même plus risqué de critiquer l’islam radical que d’insulter et de calomnier des catholiques ; plus facile de coasser au passage d’une bonne sœur que d’un barbu en djellaba. On peut, enfin, y voir la preuve que l’enfermement dans une idéologie – en l’occurrence l’antichristianisme matérialiste – et la négation du réel peuvent prendre une forme pathologique et conduire des gens intelligents à servir la soupe à leurs pires ennemis… Notons, cependant, que cette maladie ne touche pas tous les idéocrates et que l’on note, ici ou là, quelques lueurs de lucidité. La preuve, c’est que c’est le site du journal Marianne qui relayait, le 18 février, les interviews de Kamel Daoud.

François Falcon

Source : Boulevard Voltaire

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