mercredi, 02 mars 2016
Suisse : un « non » démoralisant et inquiétant
Mauvaise nouvelle, lundi 29 février matin : 59 % des Suisses ont voté « non » à l’expulsion automatique des étrangers délinquants, escrocs ou criminels. Comment cela a-t-il pu se produire ? Tout simplement le résultat d’une désinformation martelée à jet continu et d’une propagande d’affichage digne d’un État totalitaire.
La désinformation, d’abord. Nos amis helvètes pouvaient lire, dans un communiqué de l’Union syndicale de Suisse, sur le site uss.ch, que « l’inhumaine UDC » envisageait de priver de leurs droits tous les Suisses sans exception, de jeter aux orties les acquis sociaux et, le summum, de s’attaquer en réalité aux droits humains. Pas moins. En outre, pour les défenseurs du « non », expulser les étrangers délinquants visait à nuire aux étrangers « qui habitent la Suisse depuis longtemps ou qui sont nés dans le pays ». Et nous qui pensions plutôt que ces personnes se sentiraient infiniment soulagées de ne pas subir, comme les Suisses, la délinquance étrangère… L’Union syndicale de Suisse portait donc en étendard « la Suisse de la diversité et des minorités », tandis que l’initiative de l’UDC – comble de l’horreur – souhaitait subordonner « les droits humains pour tous » aux droits des nationaux. Pas une ligne sur le fait que l’expulsion ne concernait que les étrangers commettant deux délits. Un vote sur la base d’informations mensongères est-il encore démocratique ?
La propagande, ensuite. Afin de contrer une réponse affirmative à ce référendum, l’annonceur Parvez Sheik Fareed a inondé de neuf écrans la gare de Zurich, sur lesquels, toutes les trois minutes pendant dix secondes, les voyageurs et autres passants dans le lieu s’en prenaient plein la vue : la croix suisse déformée en croix gammée accompagnée de « Non pour une justice à deux vitesses ». Avec une moyenne de 437.000 quidams à traverser la gare quotidiennement et un coût de 3.585 francs l’emplacement (3.290 euros), il n’y a pas à dire, la dépense valait le coup ! De la publicité politique dans les gares, n’est-ce-pas étrange, en démocratie ? « Obligatoire », répond la porte-parole des Chemins de fer fédéraux suisses (CFF). Au fait, qui a payé ? De généreux donateurs, des particuliers, paraît-il. Sans autre commentaire de la part de Sheik Fareed…
Même la BBC s’y est mise, qui mettait en garde, en cas d’approbation de l’initiative UDC contre les législations suisses, lesquelles deviendraient « les plus sévères pour les étrangers parmi tous les pays européens ». Pas gentils, assimilés nazis, qualificatifs trop durs à porter, pour les Suisses qui n’ont pu se résoudre à voter « oui » ? Au fait, pourquoi ce référendum, alors qu’en 2010, le même avait été organisé ? Parce que les Suisses, à 52,9 %, avaient, justement, voté « oui » !
Le résultat du forcing suisse en faveur des étrangers délinquants ? Un avant-goût de ce qui nous attend lors des prochaines élections. Des campagnes qui ne s’adresseront ni à la raison, ni au jugement critique des électeurs, mais uniquement aux réflexes pavloviens, à la peur et aux émotions. Totalitaire ? Juste un peu…
Caroline Artus
13:17 | Lien permanent | Commentaires (0)
Les commentaires sont fermés.