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lundi, 07 mars 2016

Au camp de Grande-Synthe, le pari de l’accueil des réfugiés

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À partir de lundi 7 mars et jusqu’à mercredi, 1 200 migrants doivent quitter le terrain inondable qu’ils occupent pour un nouveau camp humanitaire financé par MSF.

Tout est fin prêt, derrière l’ancienne coopérative linière de Grande-Synthe près de Dunkerque (Nord). Deux mois de chantier ont été nécessaires pour terrasser et drainer ce terrain de 5 hectares, y apporter l’eau et l’électricité, y installer des blocs sanitaires… Il a surtout fallu remplacer à la hâte les 200 tentes initialement prévues, retournées comme des fétus de paille lors de la grande tempête de février et ses rafales à 110 km/h.

À la place, Médecins sans frontières a fait installer 300 cabanons en bois. Lundi 7 mars, c’est le jour J : près de 1 200 exilés, essentiellement des Kurdes d’Irak, doivent quitter le camp boueux du Basroch à un kilomètre de là, et s’installer dans ce camp humanitaire. Coût de l’opération pour MSF : deux millions d’euros.

« L’État ne prend pas ses responsabilités alors nous nous substituons », explique le docteur Michel Janssens, chef de mission à MSF. À Grande-Synthe, quelques centaines d’exilés ont déjà accepté de se rendre dans des centres d’accueil et d’orientation répartis sur tout le territoire. Mais aucun hébergement officiel n’est prévu sur place contrairement à ce qui se fait sur le camp de Calais, à seulement 40 kilomètres de là, où la « jungle » est progressivement démantelée au profit de 1 500 places dans des conteneurs installés par la préfecture

« Un camp ouvert, sans restriction de mouvements »

Le changement d’approche tient aussi à la personnalité du maire écologiste de Grande-Synthe, Damien Carême. Avec MSF, il défend sa propre méthode : « Un camp ouvert, sans restriction de mouvements. » L’élu ne veut pas d’un contrôle d’accès strict comme à Calais, où les migrants qui résident dans les conteneurs doivent donner l’empreinte de leur main pour entrer. Beaucoup de migrants refusent de s’y rendre de peur d’être fiché ou retenu, lorsque leur projet reste d’aller en Angleterre.

À Calais, La Vie active, l’association qui gère le centre d’hébergement, défend néanmoins sa solution : « Laisser aux personnes une clé ou un badge, c’était nous exposer à leur vol ou leur revente, explique Stéphane Duval, le directeur. Pour des raisons évidentes de sécurité, nous avons besoin de savoir qui est dans la structure », poursuit-il. Mais Damien Carême, souhaitant une mise à l’abri inconditionnelle, fait le pari d’un moindre niveau de contrainte.

C’est une toute nouvelle association, Utopia 56, qui a été retenue pour organiser la vie sur place. L’intervention humanitaire n’est pas le cœur de métier de son président, Yann Manzi. D’habitude, c’est plutôt dans les festivals de musique que ce Breton s’active. Pendant les Vieilles Charrues, il régit le camping de près de 35 000 festivaliers. Gérer les mouvements de personnes, il a l’habitude.

Une école et des cuisines

« Notre mission sera avant tout d’aider les migrants et les associations à s’approprier l’espace. Cela implique beaucoup de coordination », explique le responsable. Parmi les associations partenaires du projet, on trouve l’Auberge des Migrants, Salam, Emmaüs… Les mêmes qui se sont élevés contre le démantèlement des « lieux de vie » (lieux de culte, théâtre, bibliothèque, espaces d’échange, services juridiques, de cours de français…) dans la « jungle » de Calais.

À Grande-Synthe, elles sont parties prenantes du projet. Une école doit ouvrir ses portes ainsi que des cuisines, permettant aux migrants de se faire à manger plutôt que de vivre des distributions de repas. En tant qu’organisateur d’événements culturels, Yann Manzi n’écarte pas l’idée de mobiliser des artistes pour organiser concerts et spectacles dans le camp.

Le responsable se prépare aussi à des moments difficiles. Il faudra lutter contre les pratiques mafieuses des passeurs à l’intérieur du camp, éviter que les hangars désaffectés situés à proximité ne soient squattés. « On ne fera pas le travail de la police, mais nos équipes seront vigilantes avec une présence sur le site 24 heures sur 24 », assure Yann Manzi. Dernier défi, enfin : éviter les intrusions sur l’A16 et la gare de triage, à proximité du lieu d’accueil. Des clôtures ont été érigées par la mairie. Car l’autoroute et le rail mènent tout droit à Loon-Plage, où les exilés montent à bord des camions pour rejoindre l’Angleterre.

Plus d’un quart de la « jungle » de Calais évacuée

Alors que le démantèlement de la moitié sud du bidonville de Calais a commencé il y a tout juste une semaine, 2 hectares sur 7,5 ont été évacués vendredi avant la pause du week-end.

Parallèlement des « maraudes sociales » ont eu lieu pour convaincre les migrants de rejoindre les conteneurs chauffés du centre d’accueil provisoire (CAP) ou les tentes de la sécurité civile.

Les exilés peuvent aussi aller dans l’un des 102 centres d’accueil et d’orientation (CAO) répartis sur le territoire et faire une demande d’asile en France. Une centaine de migrants ont opté pour cette solution la semaine dernière.

Jean-Baptiste François

Source : La Croix

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