dimanche, 13 mars 2016
Test électoral pour Merkel en pleine crise des réfugiés, les populistes en embuscade
Quelque 13 millions d'Allemands votent dimanche pour trois élections régionales , des scrutins qui pourraient faire plonger le camp d'Angela Merkel et faire s'envoler la droite populiste dans un pays en proie aux doutes face à l'afflux de réfugiés.
Pour ce test à 18 mois des législatives, la mobilisation à la mi-journée était en nette hausse dans les Etats régionaux du Bade-Wurtemberg (sud-ouest), de Rhénanie-Palatinat (ouest) et de Saxe-Anhalt (est).
A 13H00 GMT, 35,5% des inscrits s'étaient déplacés dans le Bade-Wurtemberg, contre 30,7% lors du précédent scrutin de 2011, 35,4% en Saxe-Anhalt contre 28,5% en 2011, et 56% en Rhénanie-Palatinat contre 43% cinq ans plus tôt.
"Je vais voter pour donner une bonne leçon à la chancelière à cause de sa politique envers les réfugiés", confiait à l'AFP Ulrich, 78 ans, électeur de Magdebourg (Saxe-Anhlat) préférant taire son nom de famille.
L'Allemagne se tourmente depuis qu'elle a ouvert ses portes en 2015 à plus d'un million de demandeurs d'asile, notamment des Syriens fuyant l'enfer de la guerre à bord de canots pneumatiques pour rejoindre l'Union européenne.
- "Campagne de haine" -
Incendies de foyers de demandeurs d'asile, population scandalisée par des agressions sexuelles commises par des migrants à Cologne: les Allemands, qui avaient dans un premier temps accueilli les réfugiés avec des friandises et des oursons en peluche, semblent déboussolés.
Ils sont de plus en plus nombreux à se tourner vers la droite populiste, qui espère un score historique dimanche et, pronostique le Spiegel, "ne disparaîtra pas de sitôt".
Pour éviter un revers trop cuisant de son Union chrétienne-démocrate (CDU), la chancelière a multiplié les meetings électoraux, notamment dans le Bade-Wurtemberg, fief conservateur en péril, et en Rhénanie-Palatinat où la CDU est au coude à coude avec les sociaux-démocrates (SPD).
L'Alternative pour l'Allemagne (AfD), créée il y a trois ans pour contester l'euro avant de prôner principalement la fermeture des frontières, est néanmoins pressentie comme la grande gagnante de ces scrutins, créditée d'entre 9% et 19% des intentions de vote selon la région.
"La campagne de haine de ces dernières semaines était abominable", déplore Ingeborg Klumpp, 74 ans, retraitée à Stuttgart, qui redoute un score important de l'AfD mais assure que l'Allemagne "n'est pas un pays pauvre" et "peut" accueillir les migrants.
A l'issue du vote dimanche, l'AfD, qui siège au Parlement européen, pourrait être représentée dans la moitié des 16 parlements régionaux.
En Saxe-Anhalt, avec 19% dans les sondages, elle dispute même la place de deuxième force politique régionale au parti de la gauche radicale, die Linke. Et ce, bien que cette région déshéritée d'ex-Allemagne de l'Est accueille peu de réfugiés.
L'envolée de ce parti constitue un scénario inédit depuis 1945 dans un pays perpétuellement en quête d'exemplarité morale après l'horreur nazie.
- Merkel incontournable ? -
Les partis traditionnels qui dominent la vie politique depuis 70 ans rejettent toute coopération avec l'AfD, qualifiée de "honte pour l'Allemagne" par le ministre des Finances Wolfgang Schäuble.
La formation de coalitions régionales viables pourrait se compliquer pour le SPD et la CDU mais Angela Merkel, confiante, jure que l'AfD va refluer dès que la crise des réfugiés sera résolue.
Dans le Bade-Wurtemberg, région prospère où le taux de chômage de 4% est le plus bas d'Allemagne, la CDU pourrait perdre jusqu'à dix points par rapport au précédent scrutin et être détrônée comme première force politique régionale par les Verts. Les populistes y sont crédités de 11%.
Le candidat Guido Wolf, jugé falot dans ce Land, a pris ses distances avec Mme Merkel durant la campagne pour tenter d'amadouer un électorat très attaché aux valeurs chrétiennes et qui craint pour ses repères avec l'afflux de migrants musulmans.
Dans la région voisine de Rhénanie-Palatinat, la candidate CDU Julia Klöckner a cherché aussi à se démarquer en prônant un tour de vis en matière de politique migratoire. Elle est désormais au coude à coude avec la candidate sociale-démocrate, Malu Dreyer, tandis que l'AfD peut espérer 9% des voix.
Pour le Spiegel, "même les principaux critiques" de Merkel au sein de la CDU continuent cependant à la juger incontournable à la chancellerie. Sa popularité a d'ailleurs amorcé un rebond ces dernières semaines.
Pauline Curtet avec Marion Payet
17:01 | Lien permanent | Commentaires (0)
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