jeudi, 21 juillet 2016
L'état d'urgence prolongé jusqu'à début 2017?
L'état d'urgence devrait être maintenu au-delà des trois mois prévus dans le projet de loi de l'exécutif.
Pour la quatrième fois depuis novembre 2015 et cinq jours après l'attentat de Nice, l'Assemblée nationale est appelée à voter mardi une prolongation de l'état d'urgence, au moins jusqu'au 26 octobre mais le débat risque d'être tendu avec une droite accusatrice de l'exécutif.
La France passerait ainsi plus de onze mois sous ce régime d'exception, né pendant la guerre d'Algérie, en vertu du projet de loi qui sera soumis mardi au Conseil des ministres, puis à la commission des Lois, avant un examen nocturne dans l'hémicycle.
Le gouvernement propose une prorogation de trois mois, «mais le débat sur la durée de l'état d'urgence aura lieu au Parlement», a souligné le Premier ministre après une réunion avec les responsables parlementaires.
Des sources parlementaires et gouvernementales ont indiqué à l'AFP que l'état d'urgence devrait être finalement prolongé jusqu'à début 2017.
C'est ce que souhaite la droite, majoritaire au Sénat, qui se saisira mercredi du texte et prévoit de durcir son arsenal de mesures.
A certaines conditions
Le parti Les Républicains estime qu'une prorogation de six mois est un «minimum» et qu'elle pourrait aller «au-delà, pour prendre en compte les échéances (électorales) de l'année 2017».
Les élus LR voteront la prolongation, mais à certaines conditions, comme des pouvoirs accrus aux préfets, a décidé lundi soir le bureau politique, demandant aussi une commission d'enquête parlementaire sur l'attentat de Nice.
Décrété par le chef de l'État après les attentats de Paris et Saint-Denis (130 morts), l'état d'urgence a déjà été prolongé par le Parlement en novembre, février et mai.
La dernière prolongation avait été de deux mois, contre trois précédemment, pour assurer la sécurité de l'Euro et du Tour de France.
Quelques heures après avoir confirmé à la télévision la fin de l'état d'urgence le 26 juillet, car cela n'aurait «aucun sens» de le maintenir «éternellement», François Hollande avait annoncé, dans la nuit de jeudi à vendredi, une nouvelle prolongation de trois mois.
Entre les deux interventions télévisées du président est survenu l'attentat sur la promenade des Anglais, revendiqué samedi par le groupe État Islamique, qui a fait 84 morts, dont 10 enfants et adolescents.
Le retour des perquisitions administratives
Une loi sur la procédure pénale promulguée en juin devait prendre le relais de l'état d'urgence, étendant notamment les possibilités de contrôle, et d'usage des armes par les forces de l'ordre.
Mais, «après Nice, il était difficile d'expliquer à l'opinion publique qu'on n'allait pas le rétablir», a déclaré à l'AFP le chef de file des députés PS, Bruno Le Roux.
Non seulement la possibilité de perquisitions administratives, suspendue en mai, sera réautorisée, mais le projet de loi permettra d'exploiter les données des ordinateurs et téléphones saisis, a annoncé Manuel Valls aux parlementaires.
Très loin de la quasi-unanimité de l'automne et de la large acceptation des fois suivantes, le débat sur l'état d'urgence se fait ces derniers jours par médias interposés sous une forte tension post-attentat, accrue par l'approche de la présidentielle et de la primaire à droite.
Les reproches ciblant l'exécutif émanant de la droite et de l'extrême droite augurent d'interventions vives devant l'Assemblée nationale, même si M. Le Roux a espéré «un moment de recul de la démagogie».
Dans le sillage des enseignements de la commission d'enquête parlementaire post-attentats de 2015 qu'il a présidée, le député LR et ancien magistrat Georges Fenech a déclaré après Nice que «l'état d'urgence ne règle rien. Ça rassure, c'est tout».
Résistances des deux côtés
S'il était «justifié» après le 13 novembre et si les perquisitions et assignations à résidence ont eu un «effet déstabilisateur» initial, ce régime d'exception a vu son impact «rapidement amenuisé» et «en matière antiterroriste, la voie judiciaire reste prépondérante», observait le socialiste Sébastien Pietrasanta dans son récent rapport pour cette commission.
Président du parti LR et probable candidat à la primaire, Nicolas Sarkozy a jugé vendredi «indispensable» de prolonger l'état d'urgence. Mais comme d'autres responsables de droite, il a reproché à l'exécutif de ne pas avoir fait tout le nécessaire pour protéger les Français.
«On ne peut pas se contenter de répéter l'état d'urgence à l'identique», a dit dans la journée le président de la commission des lois du Sénat Philippe Bas (LR), menaçant que le Sénat adopte «son propre texte» et contrarie ainsi l'objectif gouvernemental d'une adoption conforme dès mercredi.
À gauche, certains, dont les écologistes critiques du gouvernement, refuseront de «prolonger un état d'urgence qui limite les libertés individuelles et monopolise des forces de l'ordre épuisées par des mois d'occupation du terrain, sans malheureusement pouvoir garantir un risque zéro».
14:56 | Lien permanent | Commentaires (0)
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