mercredi, 10 août 2016
Les extrémistes gagnent encore en popularité en Slovaquie
Le néonazi Marian Kotleba, fraîchement élu député au Parlement slovaque, a fait retirer récemment le drapeau européen lors d’une de ses conférences de presse. "Seul notre Seigneur trône au-dessus du drapeau slovaque", a-t-il lancé à l’occasion. Lui et ses bras droits n’en sont pas à leur première provocation. Depuis l’élection surprise de quatorze de ses hommes en mars dernier, le parti d’extrême droite, raciste et antieuropéen Notre Slovaquie (L’SNS) se sent pousser des ailes.
En l’espace de cinq mois à peine, ce microparti a organisé, dans la capitale Bratislava, une contre-manifestation à la Gay Pride rebaptisée "Parade des déviants". Ses membres ont défilé "contre le diktat de Bruxelles" et les réfugiés; un événement qui s’est terminé par le procès soi-disant improvisé des hommes politiques que les manifestants voulaient "pendre". Et ce n’est pas tout : un des députés du parti a été intercepté alors qu’il s’apprêtait à entrer dans l’enceinte du Parlement avec un pistolet 9 mm.
Des milices très actives
Marian Kotleba, le chef du parti, a en outre officiellement déclaré qu’il envisageait d’utiliser 5 des 5,2 millions d’euros, versés par l’Etat à la suite de son succès électoral, pour créer des milices qui patrouilleraient en uniforme afin de "faire régner l’ordre là où la police n’y parvient pas".
Le quotidien slovaque "Sme" relève d’ailleurs que les milices paramilitaires créées par des groupuscules d’extrême droite sont plus actives ces derniers mois. "Le fait d’être représenté au Parlement renforce leur popularité et leur confiance en eux", assure Jaroslav Nad, spécialiste des questions de défense et sécurité. Depuis le début de l’année, la police slovaque a enregistré une hausse du nombre d’actes criminels perpétrés par des groupes extrémistes. Et sur Internet, les autorités observent un déferlement de haine à l’encontre des Juifs, des Roms et des migrants, les cibles privilégiées de L’SNS.
Une contribution politique nulle
En fait, "c’est à l’extérieur du Parlement que les fascistes restent les plus actifs et les plus agressifs", explique Grigorij Mesežnikov, directeur de l’Institut slovaque des affaires publiques. Pourquoi ne se démènent-ils guère dans l’hémicycle, alors que 8 % des électeurs slovaques leur ont confié un mandat ? D’après le politologue, ils en seraient bien incapables. "La plupart de leurs membres n’ont aucune expérience politique et ont reçu peu d’éducation. Leur contribution pour l’heure est absolument nulle. Ils n’ont aucun impact sur les réformes en cours." De fait, sur les quatorze extrémistes élus, aucun n’est un professionnel de la politique, ils sont vendeur, policier municipal, enseignant, charpentier ou électricien.
Et leurs collègues parlementaires leur mettent volontiers des bâtons dans les roues. Une seule personne a voté pour que Marian Kotleba devienne vice-président de la commission de défense et de sécurité, tandis que l’un de ses bras droits a lui aussi échoué à prendre la tête de la commission économique faute de soutiens. Que pense le leader du parti de l’isolement dans lequel ses pairs le tiennent ? "Cela changera au fil du temps", croit-il savoir.
En attendant, les élus de Notre Slovaquie ne parviennent pas à imposer leurs idées. Ainsi leur proposition d’instaurer une minute de silence en mémoire de Josef Tiso, le président de la Slovaquie amie de l’Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre mondiale, a été sèchement refusée.
Malgré leur relatif silence au Parlement, "ils font désormais partie du paysage politique et je pense qu’ils sont partis pour y rester longtemps", poursuit Grigorij Mesežnikov. En outre, les extrémistes sont plus visibles dans les médias, et de plus en plus populaires. Selon un sondage récent, si les élections législatives avaient eu lieu fin juin, 10,7 % des Slovaques auraient voté pour le parti néonazi, soit près de trois points de plus que lors des élections de mars dernier…
11:10 | Lien permanent | Commentaires (0)
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