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samedi, 20 août 2016

Burqa: Merkel cède aux revendications de sa base

Face à l’émergence de l’extrême droite, les conservateurs allemands tombent à leur tour dans le piège du débat sur le voile.

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Il n’existe aucun chiffre officiel sur le voile intégral en Allemagne. Même à Berlin, ville très cosmopolite, il est extrêmement rare d’en voir. Il y en a sur les avenues commerçantes du quartier chic de Charlottenburg, mais il est porté par des touristes saoudiennes. Quant à la burqa, qui cache aussi les yeux, personne n’en a jamais vu. A l’approche d’une année électorale importante, qui s’achèvera dans un an avec les législatives, la proposition des ministres conservateurs des Länder présentée ce vendredi à Berlin sonne donc comme une mesure électoraliste. Elle ne reste d’ailleurs qu’une «proposition» du camp conservateur, ont précisé les trois ministres présents.

Ce n’est pas un hasard si ce sont deux ministres de l’Intérieur actuellement en campagne électorale dans le Mecklembourg-Poméranie-Occidentale et à Berlin qui ont présenté ce document hier avec Thomas de Maizière, le ministre fédéral de l’Intérieur (les élections ont lieu le 4 et le 18 septembre). Ils veulent bannir la burqa des écoles, des administrations, des tribunaux et au volant des voitures. «Le voile intégral ne correspond pas aux valeurs de notre pays ouvert sur le monde», a résumé Thomas de Maizière.

Le ministre a répété que cette interdiction partielle était un problème d’intégration. «Le voile intégral n’a rien à voir avec la sécurité», a-t-il répété alors que le document propose parallèlement une série de mesures concernant 15 000 policiers supplémentaires et plus de surveillance vidéo.

Les propositions sont donc interprétées par les experts comme une réaction à l’émergence de l’AfD (Alternative pour l’Allemagne), le parti d’extrême droite désormais ancré dans le paysage politique. «Les conservateurs veulent se réapproprier le thème de la sécurité», analyse Volker Kronenberg, politologue à l’Université de Bonn.

Le ministre a fait une autre concession à ses amis en campagne électorale en acceptant le principe d’une déchéance de nationalité pour les djihadistes avec un double passeport. «Quelqu’un qui se bat contre l’Allemagne ne peut pas être Allemand», a-t-il résumé.

Même certains ténors du Parti chrétien-démocrate (CDU) s’inquiètent de cette dérive populiste. «La situation en matière de sécurité est suffisamment préoccupante pour qu’on arrête de se focaliser sur des mesures symboliques. On va finir par faire croire aux gens que la double nationalité est le signe d’un manque de loyauté envers l’Allemagne. Ce genre de débat surréaliste ne peut que profiter à l’AfD», prévient Armin Laschet, vice-président de la CDU, qui demande qu’on cesse ce débat sur la burqa et la déchéance de nationalité.

L’AfD est déjà présente dans la moitié des parlements régionaux. Ouvertement islamophobe, elle est en mesure d’entrer au Bundestag en automne 2017, créditée de 10% des voix, et de devenir la troisième force politique en Allemagne.

«Les conservateurs nous offrent un spectacle estival navrant», ajoute Irene Mhalic, porte-parole du groupe parlementaire écologiste de l’Assemblée fédérale (Bundestag). «Nous n’avons pas besoin de propositions racoleuses pour notre sécurité. Après la tuerie de Munich, les conservateurs devraient nous faire plutôt avancer sur la législation des ventes d’armes sur Internet», ajoute-t-elle.

Christophe Bourdoiseau

Source : Tdg.ch

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