Comment concilier la volonté du peuple suisse de fixer des contingents d’étrangers et la préférence nationale avec le respect de l’accord avec l’Union européenne sur la libre circulation des personnes qui interdit cette limitation ? Pour « sortir de l’impasse », le gouvernement de Berne prépare un nouveau référendum sur l’immigration.
L’annonce, mercredi, par le gouvernement fédéral d’un projet de référendum sur l’immigration constitue un nouveau rebondissement dans un feuilleton qui dure depuis trois ans. Le 9 février 2014, le peuple suisse a accepté à une courte majorité une initiative de l’UDC (droite conservatrice) dite « Contre l’immigration de masse », qui prévoit la réintroduction de plafonds et de contingents annuels pour les étrangers dans un délai de trois ans. Cette limitation est incompatible avec les accords bilatéraux avec l’Union européenne, principal partenaire commercial du pays, qui impose la libre circulation des personnes. Bruxelles reste inflexible et ne veut pas accorder un traitement de faveur à la Suisse pour ne pas ouvrir une brèche dans laquelle la Grande-Bretagne pourrait s’engouffrer lors de la négociation des modalités du Brexit.
Comment « sortir de l’impasse » ?
À six mois de l’échéance fixée par l’initiative, le Conseil national, la chambre basse du parlement fédéral, a concocté en septembre un projet qui prévoit une préférence nationale « light » et qui, selon les diplomates suisses en poste à Bruxelles, pourrait être compatible avec la libre circulation. Entre-temps, un groupe d’intellectuels a lancé l’initiative populaire dite Rasa ou « Raus aus der Sackgasse » (« Sortir de l’impasse ») qui vise simplement à annuler le vote du 9 février.
Le gouvernement fédéral s’oppose à cette initiative et a annoncé un contre-projet, dont le contenu sera dévoilé en avril 2017. Comment concilier l’inconciliable et réunir une majorité en votation ? Ce nouveau vote sur l’immigra-tion aura lieu probablement en 2018. En attendant, la Suisse ne réintroduira pas des contingents pour les étrangers qui concerneraient aussi les travailleurs frontaliers.
Journal proche des positions de l’UDC, la Basler Zeitung fustige le changement de cap du gouvernement en rappelant que la ministre socialiste de la justice Simonetta Sommaruga avait, au soir du 9 février 2014, déclaré vouloir respecter la volonté du peuple et « régler à nouveau l’immigration avec des contingents ». Très remonté contre ce gouvernement qui « tranche à la hache les racines de la démocratie directe » , l’éditorialiste du quotidien bâlois s’indigne : « Qui a le dernier mot dans ce pays ? Est-ce, comme dans la plupart des autres, un cercle de pouvoir, un comité central ou une élite, qui sait mieux que le peuple ce qui lui convient ? Ou sont-ce des citoyennes et des citoyens habilités à décider eux-mêmes de leur destin ? »
A. D.
Source
Les commentaires sont fermés.