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dimanche, 20 novembre 2016

Au procès des Nordistes tentés par le djihad, le principal prévenu reste muré dans le silence

 

 Le regard fixe, quelques sourires en coin et, tout au long de la journée, la même volonté farouche de garder le silence. Lyes Darani, 26 ans, crâne rasé et silhouette bodybuildée comparaissait vendredi devant le tribunal correctionnel de Paris aux côtés de cinq autres personnes, toutes originaires de la région lilloise. Soupçonné d'appartenir à la mouvance « salafiste », de s'être rendu en Syrie, d'être revenu en France et de s'être procuré des armes, le jeune franco-algérien qui encourt jusqu'à dix ans de prison, a refusé catégoriquement de s'exprimer face aux magistrats.

« C'est quelqu'un de dangereux »

À l'occasion de cette première journée d'audience, le président de la 16e chambre du tribunal correctionnel, Laurent Raviot, s'est efforcé de retracer le parcours du Lillois. L'affaire débute en octobre 2013 suite au signalement d'une jeune femme auprès de la police locale qui accuse Darani, qu'elle dépeint comme « quelqu'un de dangereux » de cacher plusieurs armes à son domicile de Maubeuge. Fiché S et suspecté d'appartenir à la « mouvance islamiste radicale », le principal prévenu se serait rendu en Syrie entre juillet et août 2013. Lors de ses multiples auditions, Lyes Darani a systématiquement nié avoir voulu rejoindre un groupe djihadiste mais a reconnu avoir séjourné un mois à Antioche en Turquie dans un cadre « humanitaire ».

Les investigations des services de renseignements et le signalement de celle qui se présente comme son ex-compagne, finissent par convaincre la police d'interpeller le jeune homme, alors employé « bénévolement » au sein d'une entreprise de pompes funèbres. Lors des perquisitions menées au domicile de ses parents, les forces de l'ordre saisissent une clé USB contenant de nombreux documents de propagande djihadiste, un livre rédigé par Ayman Al-Zawahiri, leader d'Al-Qaïda, une cagoule, plusieurs treillis et un écusson de la shahâda, la profession de foi musulmane.

Une « vengeance personnelle » ?

Des éléments insuffisants pour les avocats du prévenu, seul à comparaître dans le box des accusés. « Les services de renseignements ciblent systématiquement ce type d’éléments. Et mis bout à bout, cela fait froid dans le dos. Mais la shahâda existait bien avant sa récupération par  l’Etat Islamique. Pourquoi ne pas cibler des éléments qui correspondent à des charges ? », a interrogé Xavier Nogueras, l’un des deux conseils de Darani. D’autant que les armes évoquées par la jeune femme à l’origine du signalement ne seront jamais retrouvées. Quant aux autres éléments découverts par la police, le prévenu a expliqué avoir récupéré la clé USB pour se « documenter sur les différents courants de l’islam » et pour « se faire une opinion ».

Enfin, les liens unissant Lyes Darani à celle qui est à l’origine de son signalement, restent troubles. Lui nie avoir tissé quelconque relation avec cette jeune femme rencontrée par hasard sur un marché et dénonce une "vengeance personnelle", elle, aurait expliqué aux enquêteurs être restée en couple plusieurs mois avec le Lillois, l’un de ses anciens clients réguliers lorsqu’elle se prostituait. Détenu « exemplaire » depuis trois ans à la prison de Fleury-Mérogis, récemment placé au sein de l’unité dédiée aux détenus radicalisés, le prévenu « souffrirait de cette proximité avec des hommes dont il ne partage pas les opinions », a souligné un expert psychologue. Une situation vécue comme une punition selon Matthieu Chirez, l’un de ses avocats : « Son silence est une forme de protestation. »

Le procès doit se poursuivre jusqu’à mardi. Les autres prévenus, trois hommes vivant dans la région de Lille, accusés d’avoir voulu rejoindre à la même période les rangs des jihadistes ainsi qu’un couple de Roubaix accusé d’avoir collecté des fonds pour financer le jihad, seront entendus lundi.


Helene Sergent

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