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mardi, 05 avril 2016

Hôtesses d'Air France, burkini, transports séparés : accommodements raisonnables ou islamisation ?

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Voile, burkini, dîners et transports où hommes et femmes sont séparés : les manifestations ostentatoires de l'islam se multiplient dans l'espace public. Les politiques et la société doivent prendre position, estime Eloïse Lenesley.

Le 16 mars dernier, se tenait un dîner d'étudiants comme tant d'autres à la London School Economics. À un petit détail près: filles et garçons étaient placés à des tables séparées, chaque groupe étant, en outre, isolé du regard de l'autre par un panneau géant. Deux numéros de téléphone distincts avaient même été mis en place pour réserver les billets d'entrée. Au Royaume-Uni, la ségrégation sexuelle initiée dans le cadre de rassemblements musulmans n'est pas exceptionnelle. Le rapport de l'association Student Rights s'alarmait déjà en 2013 de l'expansion du phénomène: pas moins de 180 interventions de prêcheurs radicaux avaient été recensées, sur un an, dans des établissements aussi prestigieux que Cardiff ou l'UCL et, pour plus d'un quart d'entre elles, hommes et femmes étaient priés de ne pas se mélanger. Parfois, ces dernières étaient reléguées au fond de la salle, comme lors d'un séminaire à Leicester University. Loin de condamner ces pratiques, le règlement des UK Universities avait même, dans un premier temps, accordé sa bénédiction, en suggérant de s'accommoder aux exigences de certains conférenciers pour raisons religieuses… avant d'opérer une piteuse volte-face au vu du tollé médiatique et d'une pétition engrangeant 8000 signatures en quelques jours. «Dans leurs efforts pour favoriser l'intégration, les UUK encouragent le sexisme et avalisent la discrimination», se désolait alors la féministe iranienne Maryam Namazie, en guerre contre «l'apartheid sexuel».

En août 2015, le membre du Parti travailliste Jeremy Corbyn avait préconisé de réserver des voitures du métro londonien aux femmes - une proposition déjà évoquée par la ministre des Transports Claire Perry l'année précédente. Aujourd'hui, c'est une compagnie allemande, Die Mitteldeutsche Regiobahn, qui annonce que des wagons de ses trains seront désormais dédiés aux femmes. Mais rien à voir avec les événements de Cologne, s'empresse-t-elle de préciser. Rien à voir. Il n'empêche que la démarche procède de la même logique. Se cacher de la concupiscence masculine, se dérober à la prédation, plaider coupable d'être objet de tentation, se retrouver cloisonnée dans son statut de femme. Cette même Allemagne où, le mois dernier, trois facs ont fermé leurs salles de prière, parce qu'elles étaient sous la coupe de musulmans radicaux qui imposaient la ségrégation sexuelle, voit ses chemins de fer emprunter de tortueuses dérives.

Tandis que l'Hexagone voyage par ciel voilé. La direction d'Air France a fait savoir à ses hôtesses qu'elles devraient obligatoirement porter un pantalon durant le vol, ainsi qu'une veste ample et un foulard islamique dès la sortie de l'avion, sur la future ligne Paris-Téhéran remise en service le 17 avril prochain. Fureur du personnel navigant et des syndicats, qui ont dû batailler plusieurs semaines pour «établir la possibilité d'un principe de volontariat au nom du respect des libertés individuelles». Ils ont finalement obtenu gain de cause auprès du DRH: un «dispositif d'exception» permettra aux récalcitrantes d'être réaffectées vers d'autres destinations.

Sur la terre ferme, les grandes enseignes de prêt-à-porter s'engouffrent dans l'interstice de la «mode pudique». Chasteté de l'épithète drapé d'opportunisme mercantile. Exit la haute couture de Coco Chanel ou d'Yves Saint Laurent qui émancipa les femmes, place aux burkini, abaya, hijab et autres geôles synthétiques qui les engoncent dans la soumission. Une fois n'est pas coutume, la seule féministe qui fait entendre sa voix pour appeler au boycott de ces marques est Elisabeth Badinter. Une exaspération partagée par Agnès B, Pierre Bergé et la ministre du Droit des femmes Laurence Rossignol, qui a commis l'imprudence d'esquisser un périlleux parallèle entre les voilées consentantes et les «nègres américains qui étaient pour l'esclavage». Il n'en fallait pas plus pour porter à ébullition médias et réseau sociaux, trouvant là le prétexte providentiel d'occulter le débat sur les tenues islamiques et d'éreinter, au nom de l'antiracisme, l'intrépidité intellectuelle de la ministre. Car il ne fait pas bon être de gauche et dénoncer les maux inhérents à l'islamisation du pays. Auteur du rapport «Génération radicale» promptement enseveli dans les méandres de la couardise hollandienne, Malek Boutih souffre de deux tares très mal perçues dans son propre camp: le franc-parler et le bon sens. Morceaux choisis de ses propos au Grand Journal au lendemain des attentats de Paris: «Pas faire des réunions, pas faire des commissions, pas faire de la paperasse, mais passer à l'action.» Résultat, des semaines de débats stériles qu'on savait perdus d'avance sur la déchéance de nationalité. «Si on s'occupait des femmes, si on les libérait, si on enlevait ce voile islamique, si on leur permettait l'égalité!» C'est mal barré (voir plus haut). «On doit mettre la méritocratie au cœur du fonctionnement: on ne donne pas des allocations, du pognon, des vacances à n'importe quel voyou» Oui mais voilà, l'angélisme a la vie dure. «Depuis que je m'exprime sur les banlieues, je vois que je gêne un certain nombre de petits intérêts de quotidien. Y'en a qui sont très contents d'avoir un ghetto d'électeurs pour eux.» Et là, le député de l'Essonne met le doigt où ça fait mal: la complaisance clientéliste d'élus de tous bords prêts à livrer aux émissaires de l'ombre les territoires d'une République morcelée, capables de monnayer la construction d'une mosquée contre le gavage des urnes, préférant se conforter dans le mirage qu'en lâchant un peu de lest, ils récolteront la paix sociale. Or, à l'inverse, ils se retrouvent piégés dans la politique du toujours plus. Plus de concessions au communautarisme, au fondamentalisme religieux.

Pour avoir osé dire que «ce n'était pas un hasard que Coulibaly ait grandi à Grigny», Malek Boutih s'est vu traîner en justice par le maire pétri d'indignation. Comme si la tristement célèbre cité de la Grande-Borne n'était pas un racailleland hors concours depuis vingt-cinq ans, une souricière de la délinquance qui n'a pas attendu 2005 pour faire flamber des bagnoles. Mais il ne faut pas le dire. De même, ne divulguons pas qu'une «centaine de quartiers en France présentent des similitudes potentielles avec ce qui s'est passé à Molenbeek», comme l'a avoué Patrick Kanner, ministre de la Ville, que ces déclarations sulfureuses ont extirpé avec fracas de l'anonymat médiatique dans lequel il végétait jusqu'alors. Là encore, pourquoi une telle bronca des élus et des médias de gauche? Où réside la finalité d'un tel aveuglement face à la menace salafiste? Dans quel labyrinthe idéologique s'égare ce travestissement du réel, qui nie depuis des années la banalisation des vêtements islamiques, des discours anti-France, des départs pour le djihad, des zones de non-droit, qui nous a anesthésiés avec des fables de «loups solitaires», de «déséquilibrés» alors que des cellules terroristes très organisées se développaient dans les banlieues «populaires»? La réponse se résume peut-être à quelques chiffres.

L'économie musulmane, en plein essor, draine 1,8 milliard de consommateurs. Ils seront 2,4 milliards en 2030, à raison d'une démographie se situant entre 2,5 et 3% par an. Le marché du halal représente entre 5,5 et 7 milliards d'euros en France (premier consommateur d'Europe, avec une progression de 17% dans les grandes surfaces), 700 milliards de dollars dans le monde (2000 milliards de dollars en 2025) ; le marché de la mode musulmane devrait, lui, atteindre 500 milliards de dollars d'ici à 2019. L'Europe devra-t-elle sacrifier ses valeurs, sa culture sur l'autel des intérêts pécuniaires et géopolitiques? Accepter l'émergence de lieux de culte financés par des Saoudiens comme à Nice, malgré l'opposition du maire Christian Estrosi? Tolérer la ségrégation sexuelle, les corps dissimulés comme une maladie honteuse, l'annexion de quartiers entiers par les fondamentalistes? A-t-elle déjà renoncé? «Je vis comme je peux, dans un pays malheureux riche de son peuple et de sa jeunesse, provisoirement pauvre dans ses élites, lancé à la recherche d'un ordre et d'une renaissance à laquelle je crois. Sans liberté vraie, et sans un certain honneur, je ne puis vivre», disait Albert Camus.

Eloïse Lenesley

Source : Le Figaro

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