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mardi, 12 avril 2016

La recherche sur l’islam de France est relancée

Une série de six appels à projet vient d’être publiée conjointement par les ministères de l’intérieur et de l’enseignement supérieur et de la recherche, sur des thèmes liés à l’islamologie ou à l’islam de France.

Discours de rupture, écoles coraniques, écoles confessionnelles, mais aussi auteurs réformistes : tous ces travaux devraient permettre aussi de « répondre aux besoins de connaissance des pouvoirs publics ».

Comme promis en février 2015, le gouvernement souhaite relancer la recherche en islamologie et sur l’islam de France. Le ministère de l’intérieur, en partenariat avec le ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, vient de publier une série d’appels à projet sur différents thèmes.

Les chercheurs désireux d’y répondre - titulaire d’une thèse de doctorat dans le domaine des sciences humaines et sociales, affilié à un laboratoire de recherche reconnu, et bénéficiant d’une réelle compétence dans les champs et thématiques impliquées - ont jusqu’au 30 mai pour se manifester. Les ministères leur laissent la possibilité de se constituer en « équipes » sous la responsabilité d’un porteur de projet.

Un premier travail portera sur « les discours de rupture dans l’islam contemporain ». « Depuis la proclamation d’un califat par l’organisation État Islamique en 2014 et le départ de plusieurs milliers de jeunes européens pour la Syrie ou l’Irak, de nombreuses réflexions sur le processus de radicalisation » ont vu le jour.

Enquête de terrain

« Mais en deçà de la seule radicalisation se matérialisant en appel au djihâd, on connaît toujours assez mal les « discours de rupture » avec la société environnante qui circulent dans l’espace discursif musulman francophone contemporain », précise la note, qui demande aux chercheurs à la fois de travailler sur la diffusion de ces discours sur Internet mais aussi d’enquêter sur le terrain, dans « les régions parisienne, lyonnaise, lilloise, toulousaine ou marseillaise ».

Le projet n° 9 porte sur « l’enseignement confessionnel musulman destiné aux enfants (5-11 ans) », autrement dit sur les écoles coraniques généralement accolées aux mosquées. À partir d’entretiens avec « les enseignants et les parents d’élèves », la recherche devra répondre à toute une série de questions sur le contenu de ces cursus.

Projet pédagogique parfois incertain

Corollaire de ce dernier, un autre projet de recherche porte cette fois sur les écoles confessionnelles musulmanes, en plein développement depuis les années 2000 et notamment l’interdiction des signes religieux à l’école publique. « À côté d’établissements ayant fait leurs preuves, à travers notamment leur passage sous contrat avec l’État, on constate également une recrudescence d’établissements au projet pédagogique parfois incertain », reconnaît la note publiée conjointement par les deux ministères.

L’objectif sera à la fois d’établir une cartographie des établissements, de s’intéresser au contenu des programmes pédagogiques, et de réfléchir aussi au statut à leur donner : sous contrat d’association avec l’État ou non ?

Héritiers de Mohammed Arkoun

Le projet n° 11 concerne « Les approches réformistes dans l’islam contemporain et leur influence en France », autrement dit ces nouvelles approches qui envisagent le « corpus sacré et la tradition scripturaire islamiques » à la lumière des sciences humaines.

Parmi ces auteurs contemporains qui « bousculent ainsi les frontières de ce que Mohammed Arkoun appelait la « clôture scripturaire » en renouvelant la tradition scripturaire islamique et de l’histoire sainte et apologétique » - et que les deux ministères voient comme un « vivier en pleine croissance » - la note cite les noms des Tunisiens Hicham Djaït ou Abdlemajid Charfi, ou, en France, d’Eric Geoffroy, Abdennour Bidar, Rachid Benzine ou encore de l’imam Tareq Oubrou.

Enfin, « il est envisagé de financer le prolongement de l’étude préliminaire sur « Le marché halal en France et en Europe » amorcée en 2015 », écrivent les deux ministères, ainsi que de proposer à une équipe de recherche de mener une investigation sur « le hadj », c’est-à-dire le pèlerinage à La Mecque.

Déclin de l’islamologie en France

« La demande de halal répond à une démarche éthique mais aussi parfois à des logiques de repli communautaire, (et) illustre une perte de confiance des consommateurs musulmans qui demandent plus de clarification et de transparence », indique la note n° 12.

La décision du gouvernement de réinvestir la recherche, qui s’ajoute à la création de postes à l’université, « fait suite au constat d’un déclin de l’islamologie en France, contrairement à la plupart des pays européens, et d’un défaut de renouvellement des travaux en sciences humaines portant sur l’islam de France », reconnaissent les deux ministères dans un « guide des appels à projets de recherche 2016 ».

Une ligne de crédits de recherche intitulée Islam, Religion, Société a donc été ouverte pour la première fois à la rentrée 2015.

Anne-Bénédicte Hoffner

 

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