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vendredi, 13 mai 2016

L'affaire Piquemal questionne le rapport entre armée et extrême-droite

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Le procès du général Christian Piquemal commence ce jeudi. Le 6 février, il avait participé à une manifestation antimigrants interdite à Calais.

Qui est le général Christian Piquemal ?Le général Christian Piquemal, 75 ans, a eu une belle carrière. Nommé conseiller militaire du Premier ministre en 1989, il a travaillé successivement avec Michel Rocard (PS), Édith Cresson (PS) et Pierre Bérégovoy (PS). Il a ensuite été commandant de la Légion étrangère, de 1994 à 1999, et est officier de la Légion d'Honneur depuis 1996.

Samedi 6 février, il a été arrêté alors qu'il participait, microphone à la main, à une manifestation antimigrants à Calais. Autour de lui, les manifestants scandaient : « On est chez nous ! », « État dictateur ! » ou « Migrants dehors ». Alors qu'il devait être jugé en comparution immédiate à Boulogne-sur-Mer, son procès avait été reporté en raison de son état de santé. Il commence finalement ce jeudi.

Christian Piquemal est poursuivi pour « organisation d'une manifestation interdite sur la voie publique » et « participation sans arme à un attroupement qui ne s’est pas dissous après sommation de se disperser ». Les deux délits sont passibles de, respectivement, six mois de prison et 7 500 euros d'amende et un an de prison et 15 000 euros d'amende.

De source judiciaire, l'ancien militaire est considéré comme le leader de la manifestation. Mais pour son avocat, Dominique Mattéi, si « monsieur Piquemal a bien participé à la manifestation », il est n'en est pas l'organisateur. « Pour le condamner là-dessus, il faudra le prouver et on ne pourra pas se réfugier derrière sa prétendue notoriété. »

Pourquoi la manifestation était interdite ?Les organisateurs de la manifestation voulaient dénoncer « l'insécurité générée par la présence de nombreux migrants » à Calais. De 3 000 à 5 000 réfugiés d'Afrique de l'Est, du Moyen-Orient et d'Afghanistan, y vivent dans un bidonville ou dans le camp aménagé à proximité, dans l'espoir d'atteindre l'Angleterre.

Mais la préfecture avait estimé qu'« une contre-manifestation était hautement prévisible », à l'appel notamment de « mouvements extrémistes de Gauche, comprenant des militants connus pour leur violence ». Craignant des « confrontations violentes entre ces deux groupes », la préfète du Pas-de-Calais, Fabienne Buccio, avait donc interdit « toute manifestation ou rassemblement ayant trait à la situation migratoire à Calais ».

Des militaires prennent sa défenseLa prise de position de Christian Piquemal n'a pas plu au ministre de la Défense. Depuis 2000, Piquemal est officier de la deuxième section, ce qui signifie qu'il n'est plus en activité mais peut être rappelé. Et qu'il est toujours soumis au devoir de réserve. Or, selon l'entourage du ministre, Christian Piquemal ne l'a « visiblement pas respecté ». Début mars, Jean-Yves Le Drian a saisi l'armée de terre pour qu'un conseil de discipline le mette à la retraite.

Le 4 mars, trois autres généraux avaient interpellé le président de la République, dans les colonnes du quotidien Le Figaro, pour soutenir Christian Piquemal « et s'indigner de la situation à Calais ». Or Pierre Coursier, Antoine Martinez et Jean du Verdier sont, eux aussi, officiers de la deuxième section et soumis au même devoir de réserve. Menacé de sanctions par le ministère de la Défense, le général Martinez persiste ce jeudi dans Le Figaro. Selon lui, on ne peut pas demander à un soldat «  de se taire face à l'inconséquence de décisions ou de non-décisions qui mettent en danger l'existence même de son peuple ».

Willy Destierdt, 59 ans, ancien militaire de la Légion étrangère, avait organisé une manifestation de soutien à Piquemal, le 20 février à Calais, malgré une autre interdiction de la préfecture. Il a été condamné en mars par le tribunal de Boulogne-sur-Mer à trois mois de prison avec sursis, un stage de citoyenneté et l'interdiction de se rendre dans le Pas-de-Calais pendant deux ans.

50 % d'intentions de vote pour le FN à la présidentielle 2017Christian Piquemal est-il un cas isolé dans l'armée, ou le symptôme d'un penchant pour les valeurs de l'extrême-droite ?

Selon une étude du Cevipof, centre de recherches de Sciences Po, 53 % des policiers et militaires ont voté pour le Front national au premier tour des élections régionales de 2015. Au premier tour de l'élection présidentielle de 2017, 55 % auraient l'intention de voter pour Marine Le Pen, si Nicolas Sarkozy est le candidat Les Républicains.

Si Alain Juppé était le candidat Les Républicains, il attirerait plus de votes que le précédent président de la République et les intentions de vote des militaires et policiers pour Marine Le Pen descendrait, un peu, à 52,5 %.

 Après l'arrestation de Christian Piquemal, les ténors du Front national, Florian Philippot, Marion Maréchal - Le Pen et Gilbert Collard l'avaient soutenu. « Un grand serviteur de la France traité plus durement qu'un délinquant : une cruelle preuve de l'inversion totale des valeurs », avait écrit Marine Le Pen sur Twitter.

Julie Durand

Source : Ouest France

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