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mardi, 24 mai 2016

L'avertissement viennois

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Après la Hongrie, la Slovaquie, la Pologne, l’extrême droite autrichienne vient d’enregistrer hier un score historique à l’occasion de la présidentielle. Au moment où ces lignes étaient imprimées, le suspense n’était pas encore terminé. Mais quel que soit le résultat final publié aujourd’hui, le score de Norbert Hofer, le candidat du FPÖ autrichie, constitue, en soi, un tournant dans le paysage politique européen.

Depuis quinze ans, les spécialistes de la science politique scrutent et annoncent, élection après élection, la montée de forces nouvelles dites « populistes » ou « d’extrême-droite ». Ces forces n’ont pas toutes une histoire enracinée dans les mouvements totalitaires du XXème siècle. Mais elles ont une série de thématiques en commun, que les récentes crises économiques, terroristes  et migratoires ont rendu séduisantes. Le rejet de l’immigration, de l’islam, du multiculturalisme. Le refus de la mondialisation, de Bruxelles, de la finance. Le culte du référendum et une vision ethnique de la nation. Ce qui leur permet d’ailleurs de jongler habilement entre l’autonomisme régional et le patriotisme national.

L’annuaire de ces partis est de mieux en mieux connu. Du Front National aux Vrais Finlandais, de la Ligue du Nord italienne aux Parti Populaire Danois en passant par l’UDC de Suisse, le PVV hollandais ou le Jobbik hongrois, la liste est longue.

Certains de ces partis gouvernent déjà, dans les anciens pays communistes. A Varsovie, Budapest, Bratislava. Certains ont rejoint des coalitions de gouvernement, en Finlande, en Norvège. D’autres conditionnent fortement l’agenda politique (Pays-Bas, France, Italie). Même l’Allemagne, depuis la percée de l’Alternativ für Deutschland aux dernières régionales, n’est plus épargnée. La poussée autrichienne n’est donc pas isolée.

Populisme, le mot magique

Elle n’en est pas moins très préoccupante. Certes, cette poussée se nourrit pour une bonne part d’une colère des électeurs, justifiée à bien des égards. Certes, le vote viennois confirme, de manière éclatante, un effondrement des partis traditionnels de gouvernement, à gauche comme à droite, au profit de forces plus radicales. C'est d'ailleurs le principal défi que pose ce signal, il est lancé aux formations démocratiques qui n'ont manifestement pas su se rénover suffisamment, ou agir avec suffisamment d'efficacité, pour mériter l'onction populaire.

Mais ce qui est en cause à Vienne, et dans plusieurs autres capitales européennes, ce n’est pas la validité du vote populaire, condition nécessaire, bien que non suffisante, de la vie démocratique. C’est le sentiment diffus, et pour une part fondé, que ces partis émergents ne constituent pas seulement un renouvellement de la classe politique, ils seraient potentiellement porteurs d’un agenda autoritaire caché. Est-ce le cas? Pourquoi ?

D’abord, parce que l’Histoire du XXème siècle pèse encore. Voir l’Autriche dirigée par le représentant d’un parti fondé en 1955 par d’anciens nazis crée un profond malaise. Le FPÖ, un parti néonazi ? Bien sûr que non ! C’est trop grossier comme ficelle. Tellement grossier que cela exonère le FPÖ de renier ses origines, et les partis traditionnels d’apporter les réponses aux questions posées par les électeurs sur les sujets qui fachent, notamment l’immigration.

Ensuite, ce sentiment est fondé parce que certaines droites radicales menacent déjà les fondements de la démocratie parlementaire, libérale et constitutionnelle. C’est le cas de Viktor Orban en Hongrie, et du nouveau gouvernement polonais.

Enfin, parce que le mot « populisme » est un piège habilement récupéré par ces formations anti-élites. Ce mot, en les nommant, les sert. Qui, en démocratie, peut prétendre se positionner contre le peuple ? Or, aplatir la démocratie au seul rendez-vous électoral ou référendaire, comme le font ces nouvelles forces, c’est prendre le plus sûr chemin vers la démocratie autoritaire. Poutine et Erdogan en sont l’illustration parfaite. Avant eux il y eut même pire en Europe. A Vienne, notamment.

Source : Ouest Fance

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