Ali, 34 ans, sa femme Tahriir, 35 ans, et leurs deux enfants, Nabaa, 14 ans, et Abdullah, 6 ans, viennent de Bagdad, en Irak. Ils font partie des réfugiés pris en charge par la France à l’automne 2015 pour soulager l’Allemagne, après l’importante vague d’immigration de l’été.
En septembre 2015, la petite famille est arrivée à Cergy, dans le Val-d’Oise, où elle a d’abord été placée dans un camp. L’arrivée de leur convoi, parmi les premiers en France, s’est faite sous les projecteurs et a eu le droit à la visite des officiels : « Cazeneuve, Hollande, Bartolone sont venus voir le camp… Les conditions d’accueil étaient idéales. D’où leur surnom de “réfugiés cinq étoiles”, parce que, par rapport à d’autres, ils ont eu un traitement très particulier, qui s’est complètement essoufflé par la suite », commente Patrick Paskewiez, le responsable du Secours populaire du Val-d’Oise, qui gérait le camp.
Un mois plus tard, tous les réfugiés ont été répartis dans différentes villes du département. C’est comme ça que la famille Merkath a atterri à Courdimanche, une commune d’un peu plus de 6 000 habitants située dans la banlieue ouest de Cergy. Ici, la ville a mis à leur disposition un des logements de fonction d’une école élémentaire, un joli quatre pièces avec vue sur la cour de récréation où s’amuse tous les jours Abdullah, scolarisé en CP.
Photos de famille, télévision, théière orientale et plat en céramique : la municipalité leur a fourni tout le mobilier, si bien qu’on pourrait penser que la famille a toujours vécu ici. « On n’imaginait pas que ça se passerait si bien en France. Qu’on aurait un appartement, les enfants à l’école… Avec nos voisins, des Français, ça se passe très bien. Ils nous aident pour faire les démarches administratives », s’enthousiasme Ali, qui dispose maintenant d’un titre de séjour de dix ans.
« Un pays social »
Ali était journaliste pour la ville de Bagdad quand une bombe a explosé devant leur maison. Tahriir en a encore des morceaux dans le corps. C’est à ce moment-là qu’ils ont décidé de partir. C’était en 2014.
Au bout de plusieurs mois passés en Turquie, la famille a payé un passeur (environ 8 000 €) pour aller « peu importe où, tant que c’était en Europe », se souvient Ali, cheveux gominés et cigarette électronique à la bouche.
Après un long voyage, essentiellement à pied, une carte à la main, jusqu’en Hongrie, ils sont arrivés en Allemagne. C’est là que la France leur a proposé, ainsi qu’à quelques centaines d’autres personnes, de trouver refuge dans l’Hexagone. Ce qu’ils ont accepté : « On s’est dit que ce serait mieux pour les enfants ici, que c’est un pays social », se réjouit Ali, entre deux gorgées de thé à la cardamome.
Aujourd’hui, lui cherche un travail de mécanicien, elle, une formation dans la coiffure, « mais si on accepte que je travaille en arabe, je suis prête à tout ! », sourit Tahriir, chemise bleue et cheveux au carré.
Leur manque de maîtrise du français reste en effet le principal frein à leur accès au travail alors, quand ils ne sont pas à un de leurs nombreux rendez-vous administratifs, Ali et Tahriir passent une grande partie de leur temps à essayer de progresser dans la langue de Molière en regardant des vidéos, par exemple.
Pour leurs enfants, le français n’est pas vraiment un problème. Le petit Abdullah parle déjà très bien, en témoignent des vidéos qu’Ali garde sur son téléphone portable. Quant à Nabaa, son français est encore un peu timide, mais elle parvient à suivre sa classe de 4e sans problème.
Ne retourner en Irak qu’en « touriste »
L’arrivée en France a avant tout été synonyme de liberté pour la jolie brune : « Ici, c’est mieux qu’en Irak ! En tant qu’adolescente, là-bas, je n’aurais pas le droit de faire grand-chose, et je devrais toujours porter un foulard. Ici, je peux même m’inscrire à des activités comme le hip-hop ! », se réjouit Nabaa. « Peut-être que dans vingt ou trente ans, l’Irak les acceptera habillées comme elles le sont ici ? », rigole Ali, en désignant sa femme et sa fille, pantalons et ongles vernis.
C’est d’ailleurs pour pouvoir garder cette liberté que les Merkath ne veulent pas retourner dans leur pays, « sauf en touristes ».
C’est donc en France qu’Ali et Tahriir vont construire leur nouvelle vie. En espérant « aider [leurs] enfants pour qu’ils s’épanouissent pleinement, et pouvoir rendre à la France tout ce qu’elle [leur] a donné. Inch’Allah ! ».
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