L’accueil de migrants en Bretagne se poursuit. Par ailleurs, la proportion d’immigrés ou d’enfants d’immigrés extra-européens au sein de la population bretonne (B5) augmente, plus fortement d’ailleurs en Loire-Atlantique. La Bretagne reste toutefois très loin des proportions particulièrement élevées d’extra-européens que l’on peut retrouver, notamment en Ile de France où dans les grandes métropoles françaises.
Une proportion élevée qui conduit, mois après mois, de nombreux « gaulois » ou « français de souche » à quitter le quartier dans lequel ils ont grandi, la maison de famille, les racines, pour aller vers cette « France périphérique » , moins « diverse », plus rurale, plus rassurante pour eux et leur famille également.
Le phénomène est exactement le même en Angleterre, comme l’évoquait la démographe Michèle Tribalat qui évoquait un « white flight ».
Parmi ces nouveaux déplacés de force à l’intérieur même de leur propre pays, nous avons rencontré Laurent, 47 ans, qui vit avec sa famille dans un petit village du côté de Pontivy, depuis maintenant 6 ans. Ayant toujours vécu en région parisienne, et majoritairement en Seine St-Denis (où il a été animateur socio-culturel), il tenait à nous parler de son expérience de son vécu, et surtout, de ses craintes qu’un jour la Bretagne ne soit plus la Bretagne mais bien comme la Seine St Denis aujourd’hui.
Rencontre.
Laurent se définit comme un « expatrié » en Bretagne ; « je suis un fils, un petit-fils, un arrière petit-fils de parisiens, avec des origines familiales qui permettent toutefois de faire le tour de France, mais nous sommes installés en Seine St Denis depuis des décennies. Nous avions une maison familiale à Pantin » nous dit-il.
Après avoir travaillé à La Poste un an, il passe un DUT Carrières sociales afin de devenir animateur socio-culturel. « Je ne suis pas fait pour les bureaux, ma place est sur le terrain, dans la rue, pour encadrer, pour animer, pour écouter ». Ce travail, il l’a mené durant 18 ans, dans plusieurs établissements (maison de retraite, puis maison de quartier et foyer de jeunes travailleurs). « J’ai adoré faire ce métier, mais il y a des endroits – et notamment là où j’habitais, où les différences culturelles sont telles qu’il est impossible de le faire correctement et d’être écouté ».
Laurent fait toutefois une grosse différence entre « la génération NTM et celles qui suivent ». « La génération NTM, les gars du quartier étaient ce qu’on appellerait « des racailles », mais il n’y avait pas toutes ces dérives communautaires, ethniques, religieuses. Ou pas encore de façon si marquée si l’on compare au début des années 2000 où là , on a pu le voir au grand jour . Attention, bien entendu, il y avait déjà, et cela depuis des années, des départements entiers de région parisienne à forte proportion immigrée, mais les « gaulois » n’étaient pas encore partis. Aujourd’hui, il n’y en a vraiment plus beaucoup ».
Laurent fait toutefois une grosse différence entre « la génération NTM et celles qui suivent ». « La génération NTM, les gars du quartier étaient ce qu’on appellerait « des racailles », mais il n’y avait pas toutes ces dérives communautaires, ethniques, religieuses. Ou pas encore de façon si marquée si l’on compare au début des années 2000 où là , on a pu le voir au grand jour . Attention, bien entendu, il y avait déjà, et cela depuis des années, des départements entiers de région parisienne à forte proportion immigrée, mais les « gaulois » n’étaient pas encore partis. Aujourd’hui, il n’y en a vraiment plus beaucoup ».
Quand on lui demande ce qui l’a poussé à partir s’installer dans un hameau à coté de Pontivy, lui qui aimait et qui aime toujours son métier d’ailleurs, qu’il ne pratique toutefois plus en Bretagne ce dernier n’y va pas par quatre chemins : « j’ai travaillé 17 ans avec des populations africaines notamment, dont je voyais chaque jour qu’elles devenaient majoritaires et qu’elles me mettait de facto en minorité. N’ayant jamais souhaité mettre mes enfants dans le privé, ou tenter d’avoir des pass-droits pour les préserver de certaines écoles en Seine Saint-Denis, j’ai pris la décision, avec ma femme, de vendre et de partir. Nous n’étions plus chez nous, tout simplement. ».
Lorsqu’on lui évoque alors une forme de « repli sur soi » Laurent éclate de rire : « il me semble qu’après avoir travaillé 17 ans avec des Sénégalais, des Algériens, des Kabyles, des Laosiens, et avec une grande partie des peuples de la planète venus se perdre en Seine St Denis, c’est un peu culotté de me dire cela non ? ». « J’ai toujours beaucoup de contacts là-bas. Des gens que j’apprécient, des gens de différentes origines. Mais cela n’enlève rien au fait que j’ai l’impression d’être un expatrié dans son propre pays. A Paris intra-muros, ils ont beau nous vanter le mélange, la mixité sociale, ils ne la vivent pas. Et surtout, ils n’ont pas compris qu’à force de faire venir des gens du monde entier, le mélange aura perdu sa couleur originelle ».
Laurent ne ressent pas d’amertume : « je vais pas me plaindre d’être en Bretagne quand même !». Mais il a perdu beaucoup d’illusions : « pour moi, le rôle d’un animateur, d’un éducateur même, c’était un rôle social fondamental dans notre société. Essayez de proposer des projets qui élèvent, qui transcendent, à des jeunes dont bien souvent les familles ne savent pas quoi faire – on tourne vite en rond dans une barre HLM. Essayez d’éviter au maximum les mauvaises influences, le basculement dans la drogue, la délinquance. On est pas bien payé, mais par contre, niveau enrichissement humain, c’est un métier formidable.».
Mais Laurent n’en demeure pas moins ferme sur l’impossibilité à exercer ce métier « dans des villes qui sont devenues des carrefours du monde entier où les gens n’ont absolument rien en commun, ni culture, ni religion, ni coutumes, ni moeurs. Ou plutôt si, ils commencent à avoir en commun car petit à petit, ceux qui sont différents de la nouvelle majorité s’en vont ».
En Bretagne, après avoir enchainé quelques remplacements, notamment à Rennes, et après une période passée à retaper une partie de la maison familiale, il a décidé finalement de changer totalement, et s’est lancé dans des études agricoles : « une façon de remercier la terre qui m’accueille, c’est d’apprendre les moyens de l’utiliser et de nourrir sainement mes voisins » nous dit-il. Pas question pour lui de retourner à son métier d’origine : « je ne retrouverai jamais la passion que j’ai eu pendant les dix premières années où j’ai travaillé auprès des jeunes, là-bas. Et puis les dernières années m’ont vraiment marqué. On m’a menacé, on a menacé ma famille, il fallait se taire, pas faire de vagues, surtout pas faire de vagues …». Il n’a pas envie de s’étendre plus sur le sujet.
Lorsqu’on lui demande le regard qu’il portait et qu’il porte sur la Bretagne, il nous dit : « bon, il y’a le regard d’un prolo parisien plein de cliché sur la région, forcément, je l’avais un peu en arrivant. Mais il y’a surtout la vision de la Bretagne où il faut bon vivre, où les gens se disent bonjour quand ils se croisent, ils se sourient – ou pas d’ailleurs. A la campagne, on peut laisser sa porte de maison ouverte sans risquer – pour le moment encore – à tout instant le cambriolage. On peut faire confiance à ses voisins, on respire, on découvre chaque jour des paysages et des chemins somptueux, bref, nous revivons, loin du béton et de la jungle ! ».
Laurent n’est pas naif, et a toutefois pu constater qu’il y’avait une différence entre les grandes villes bretonnes et la campagne : « c’est sûr que Rennes, et même Nantes où j’ai fait un remplacement, il y’a certains quartiers ou je me suis senti comme chez moi en Seine Saint Denis, dans les années 90. Je ne pensais pas d’ailleurs qu’il y’avait « autant » (façon de parler nous dit-il) de mixité que cela dans les quartiers ouvriers. En même temps, j’ai bien vu des femmes voilées à Locminé et des Africains à Pontivy, alors plus rien ne m’étonne ! ».
Lorsqu’on lui fait remarquer que la Bretagne n’est pas la Seine St Denis, la réponse fuse immédiatement : « pas encore. Vous avez de la chance, malgré une région qui connait ou a connu des difficultés économiques, d’avoir préservé une forme de vivre ensemble, le vrai, qui existe de moins en moins dans d’autres régions. Il faut le garder . Mais vous ne le garderez pas en faisant venir des migrants, en construisant un aéroport qui vous amènera une main d’oeuvre immigrée pas chère dans les banlieues, en vous rapprochant sans arrêt de Paris, et surtout, en votant PS !».
Laurent rigole : « non mais c’est vrai , pour moi ce sont des ordures. Ma famille était PCF, merde ! Ils nous ont trahi dans les banlieues. Ils ont acheté des jeunes. Ils ont laissé faire certaines saloperies. Et surtout, ils ont implanté en masse les familles d’immigrées que Giscard et Bouygues avaient commencé à faire venir ; partout, partout ! Ils ont tout détruit , ils feront la même chose ici si vous laissez faire, c’est dans leur ADN. Quand je vois vos quartiers à Rennes ou à Nantes, on peut deviner les yeux fermés que ce sont des municipalités PS. C’est constitutionnel chez eux de laisser se développer puis pourrir des quartiers entiers. Ils ont la folie des grandeurs, et sont persuadés que le mélange est infini ».
Il a d’ailleurs remarqué que les choses évoluent vite : « on va pas me la faire à moi. Quand je suis arrivé ici et qu’on me parlait d’immigration dans les campagnes, je rigolais, vu d’où je venais et je rigole toujours d’ailleurs, mais un peu moins. Par contre ce que je peux dire, c’est que la population immigrée, en provenance d’Afrique ou de Turquie notamment, est de plus en plus nombreuse, que ce soit à Rennes ou à Nantes pour ce que je connais, et même dans certaines campagnes. Je ne sais pas d’où ils arrivent, mais ils sont là, c’est un fait. Et à ce rythme-là, progressivement, dans 20 ans, vous aurez la Seine St Denis en Bretagne. Et vous finirez pas devenir minoritaires, dans plus longtemps encore. Et là, il n’y aura plus d’autres régions pour vous en aller si vous ne supportez plus la nouvelle façon de vivre qu’on vous imposera, puisqu’à l’ouest, y’a la flotte ! ». Rires.
Mais n’est-ce pas encore plus frustrant pour un « expatrié » de faire ce constat ? « Ce qui est frustrant, c’est de voir une naïveté qui parfois ressemble fortement à de la bêtise chez certaines personnes. Une famille d’Algériens va s’installer dans un village, et tu vas forcément trouver ici la Mère Théresa du village, un peu colonialiste tout de même, qui va vouloir organiser et mobiliser le comité des fêtes locales autour d’une soirée d’intégration à base de Couscous et de musique bretonne. La famille d’Algériens elle, s’en tamponne de ta soirée d’accueil, et peut être même qu’elle n’aime pas le couscous. Elle veut juste qu’on lui fiche la paix. Je suis à peine dans le cliché non ?».
« Oui, il m’arrive parfois de m’accrocher avec quelques uns qui semblent vraiment croire à la société où tout le monde est beau, gentil, différent et vit ensemble. Et à contrario bien souvent, ce sont ces mêmes personnes qui vont avoir une réflexion raciste stupide, une blague douteuse, un comportement d’ostracisme vis à vis de celui qui vient du village d’à côté ou pire encore, de la ville ! Ou alors qui vont être totalement intolérants avec toi si tu ne partages pas leurs opinions. C’est paradoxal. Mais encore une fois, je ne vais pas jouer le vétéran qui a fait le Vietnam. Mais j’invite tous ceux qui rêvent d’un monde de mélange à venir voir en Seine Saint Denis ce que mon département est devenu . Et à en tirer les conséquences pour chez eux, pour leurs enfants . ».
Après une bonne heure de conversation, à refaire le monde et à en apprendre plus sur une forte personnalité, éducateur chevillé au corps, blessé par la vie et surtout par ce qu’il a vu, nous le laissons reprendre la route, destination la ferme biologique où il effectue actuellement un stage d’observation…en compagnie de son fils..lui aussi en stage, mais pas au même niveau !
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