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samedi, 03 décembre 2016

Vote FN chez des Français d’origine immigrée : faut-il s’en étonner ?

 

 
Dans une émission de France Info, le 29 novembre 2016, Aziz Senni, un entrepreneur, répond à Philippe Caubère, un comédien exaspéré par le vote FN : « On n’a jamais analysé le vote FN dans les quartiers. Y a pas un Blanc ! Comment vous expliquez que, dans certains quartiers, ça monte à 15-18 % ? Donc, c’est pas que des fachos. C’est des gens qui sont aussi énervés. Énervés contre le système. » Le comédien venait de déclarer que les électeurs FN sont « des gens qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez ».

Quel mépris pour le vote populaire ! Que dirait-il des intellectuels qui ont quelque sympathie pour ce parti ? Les accuserait-il de crétinisme ? On a tout à fait le droit de rejeter les orientations du Front national : encore faut-il les combattre par des arguments et non par des anathèmes ou des insultes. Cherchons donc, le plus objectivement possible, les causes de ce vote dans des quartiers où les Français d’origine immigrée sont majoritaires.

Le phénomène n’est pas nouveau. Si, historiquement, ils ont en grande partie voté à gauche au premier tour de l’élection présidentielle (selon une enquête IFOP, 57 % d’entre eux ont choisi François Hollande contre 4 % Marine Le Pen), depuis trois ans, « le tabou du FN a sauté chez ces électeurs », estime Gilles Kepel. Le FN a d’ailleurs créé un collectif Banlieues patriotes, en janvier 2016.

La première explication, c’est que des Français d’origine immigrée ou descendants d’immigrés ont un comportement électoral semblable à celui des autres Français. Malek Boutih, député PS de l’Essonne, qu’on ne peut soupçonner de complaisance pour le FN, le confirme : il observe que « certains Français en ont marre de ne pas être reconnus comme tels. 
 Finalement, il n’y a que le FN qui leur propose un réel sentiment d’appartenance à la nation française et à une communauté de destin ».

Deux autres explications viennent en complément. Comme la majorité des Français, ces habitants en ont assez de l’insécurité, de la réputation de leurs quartiers : ils estiment que le FN est le plus en capacité d’apporter des solutions. Ils ont conscience, également, que s’ils ne veulent pas être confondus avec les islamistes, ils doivent s’en démarquer et manifester leur volonté d’appartenir à la nation française.

Certes, ce n’est pas une attitude générale. Le Point rapportait, en octobre 2015, cette anecdote significative. Un jeune agrégé de lettres, Français d’origine algérienne, lance à ses lycéens : « Victor Hugo est l’un de nos plus célèbres poètes. » Les insultes fusent : « Tu es un traître ! Tu trahis tes origines ! » Ses élèves lui contestent l’emploi du possessif « nos » pour évoquer le génie de cet écrivain emblématique de la France. Il décide alors de prendre sa carte au Front national.

Ce n’est pas en cédant aux revendications communautaristes, en fermant les yeux pour nier les problèmes ni en les victimisant qu’on permettra aux habitants des quartiers de se sentir français à part entière. C’est en les traitant comme les autres. En les protégeant aussi des pressions qui peuvent s’exercer sur eux, en les sortant des ghettos scolaires où ils sont enfermés, en permettant aux plus méritants d’accéder à des filières générales et technologiques d’excellence, par leur travail et non grâce à une discrimination dite positive.

La France, à travers son Histoire, sous la monarchie, sous l’Empire, sous la République, a forgé un patrimoine culturel et défini des valeurs universelles. Elle se doit de les partager avec tous les Français. Tous les partis devraient le reconnaître.

Jean-Michel Léost

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