mercredi, 24 août 2016
Amar Sinacer : " Le burkini n'a rien à faire sur la plage "
Le président de l’association cultuelle musulmane d’Issoudun, Amar Sinacer réagit sur les sujets qui agitent la communauté.
Que pensez-vous de la relance de la Fondation pour l'Islam de France ?
Il n'y a pas d'Islam de France ; il y a un seul Islam. Qu'il y ait un respect des lois de la République et de ses fondements, c'est une évidence et c'est ce que l'on s'évertue de faire. Pour le reste, quels vont être ses critères, ses choix… Est-ce une façon détournée d'avoir la mainmise ? Personnellement, je suis pour un Islam francophone à 200 %. De toute façon, il y a beaucoup de musulmans qui ne parlent pas l'arabe littéraire. On se doit de faire un prêche en français et un autre en arabe…
Elle permet également de lever des fonds pour financer la construction de mosquées. Comment avez-vous financé la mosquée d'Issoudun qui a ouvert en juin dernier, après six ans de travaux ?
La mosquée d'Issoudun a coûté 160.000 € et elle a été financée par des dons de nos adhérents, une soixantaine, et grâce à de petites opérations. On a également fait le tour des mosquées en France pour nous aider.
N'avez-vous pas reçu d'aides financières de l'étranger ?
Non, mais lorsque l'on fait appel aux dons, on ne sait pas toujours d'où cela provient. Mais franchement, de l'étranger, je ne vois pas.
Jean-Pierre Chevénement dit accepter de prendre la présidence de la Fondation pour l'Islam de France à condition que les financements étrangers soient prohibés. Ce serait une bonne chose ?
Non. Qui va alors nous subventionner : l'État ? Ce qu'il ne faut pas, c'est que les dons soient réalisés par quelqu'un ou un État dans l'objectif d'avoir le monopole de la mosquée. Dans ce cas-là, je redonnerais immédiatement le chèque.
" Quoi que l'on fasse, on est toujours stigmatisé "Beaucoup de gens reprochent aux musulmans de peu réagir face aux attentats. Qu'en pensez-vous ?
On se demande toujours comment serait interprétée notre réaction. Quoi que l'on fasse, on est toujours stigmatisés. On réagit entre nous et on en parle beaucoup. Nous sommes sur la même longueur d'onde pour condamner.
Après l'attentat de Saint-Etienne-du-Rouvray, vous qui organisez des rencontres avec les catholiques du Berry, n'était-ce pas l'occasion de marquer votre sympathie ?
Avec le ramadan et tous les événements, on a été pas mal bousculés. On aurait pu marquer notre sympathie, on ne l'a pas fait, c'est vrai, mais il n'est pas trop tard. On aura toujours l'occasion de le faire car nous entretenons de bonnes relations avec nos frères catholiques.
Jusqu'à maintenant, il n'y a que les imams ou des personnes comme le président de l'Observatoire contre l'islamophobie qui réagissent. Pourquoi le quidam musulman – vous êtes tout de même quatre millions en France – ne prend-t-il pas la parole ?
A chaque fois que l'on entend un discours sur les musulmans, ce n'est jamais un discours positif. Est-ce que l'on doit faire le dos rond en attendant que ces drames s'arrêtent ?
Quarante et un musulmans au parcours d'excellence, qui sont médecins, patrons, avocats… ont estimé, il y a quelques jours, que le silence n'est plus de mise dans le contexte actuel et qu'il est nécessaire de s'impliquer dans la gestion de l'Islam en France. C'est une bonne chose ?
Cela ne peut-être que positif. Le discours n'est pas donné à tout le monde et ce n'est jamais facile de se dire. Là c'est le bon moment pour s'exprimer aux médias. Pourquoi, moi, je vais réagir ? On craint l'interprétation.
Depuis quelques semaines, le burkini fait parler beaucoup de lui. Là aussi, on n'entend pas les musulmans de la rue. Vous comprenez l'émoi sur le sujet ?
Cela me fait doucement sourire. Le burkini, c'est une très mauvaise idée pour moi. Cela nous dessert. On fait l'amalgame de tout, de la religion, de la femme. Le burkini, c'est un vêtement moulant et notre religion condamne de tels vêtements. Le burkini n'a rien à faire sur la plage !
Vous disiez à la NR, l'an passé, que la communauté d'Issoudun était sur la même ligne de tolérance. Qu'est ce qui fait que cela ne dérape pas ?
Je crois que l'on est un groupe qui discute beaucoup des problématiques nationales et qui essaie de trouver des réponses positives. On trouve toujours une solution dans la tolérance. C'est sans doute plus difficile dans une grande communauté où ils sont 3. 000.
Que dites-vous à la jeune génération ?
On a deux choses : le Coran et la vie du prophète. On leur dit que si ce n'est pas dans l'un ou l'autre, cela n'a rien à voir avec nous. Mais nos jeunes, ils ne comprennent pas cette violence. Eux aussi aimeraient dire que les attentats, ce n'est pas leur religion.
Propos recueillis par Emmanuel Bédu
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