En juin 2014, Jean-Marie Le Pen avait parlé de « fournée » à propos d'artistes hostiles au FN. Va-t-il pouvoir être jugé en France pour incitation à la haine malgré son statut d'élu européen ? Le Parlement européen vote mardi 25 octobre sur la levée de son immunité parlementaire. La commission des affaires juridiques du Parlement européen a déjà donné son accord.
Jean-Marie Le Pen est accusé d’avoir publiquement incité à la haine raciale dans un enregistrement vidéo publié le 6 juin 2014 sur le site internet du Front national. Dans son « journal de bord », Jean-Marie Le Pen s'en était pris à plusieurs artistes hostiles au FN, dont Patrick Bruel à qui il a promis de faire partie d'une prochaine « fournée ». La polémique avait entraîné l’ouverture d’une enquête.Des propos tenus en dehors de toute activité parlementaire européenne
Les deux juges d’instruction du Tribunal de grande instance de Paris ont demandé la levée de l’immunité parlementaire de Jean-Marie Le Pen en tant qu’eurodéputé. Celle-ci sert normalement à protéger les élus du Parlement européen pour leur garantir leur liberté d’expression et d’éviter toute entrave de leur travail parlementaire.
Or, comme le souligne le rapport porté par l’eurodéputée autrichienne Evelyn Regner, « il n’y a aucun lien entre les déclarations attaquées et l’activité parlementaire de Jean-Marie Le Pen et que celui-ci n’a donc pas agi dans l’exercice de ses fonctions de membre du Parlement européen ». Pour cette raison, la commission des affaires juridiques de l’hémicycle européen avait voté en faveur de la levée de l’immunité de Jean-Marie Le Pen.
À cette occasion, seuls les députés frontistes membres de cette commission avaient voté contre (Gilles Lebreton et Marie-Christine Boutonnet), les 15 autres membres ayant voté pour (pour deux abstentions). Il est de coutume sur ce genre de question que les eurodéputés suivent le vote de la commission.
Une affaire à l’origine de la séparation politique entre le père et la fille
C’est à l’occasion de cette polémique que le « journal de bord » de Jean-Marie Le Pen a été retiré du site du Front national. À l’époque, Wallerand de Saint-Just, l’avocat du parti d’extrême droite avait évoqué des « raisons juridiques ». Le FN avait changé le nom du directeur de la publication pour éviter à sa présidente, Marine Le Pen, d'être « visée par des plaintes en tant que directrice de publication du site ».
Pour la première fois, Marine Le Pen avait très nettement pris ses distances à l'égard de son père. La présidente du FN regrette les conséquences des propos de Jean-Marie Le Pen, une « faute politique ». « Je suis convaincue que le sens donné à ses propos relève d'une interprétation malveillante », expliquait Mme Le Pen. « Il n'en demeure pas moins que, avec la très longue expérience qu'est celle de Jean-Marie Le Pen, ne pas avoir anticipé l'interprétation qui serait faite de cette formulation est une faute politique dont le Front national subit les conséquences », déplorait-elle.
Fabien Cazenave
Ouest France
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