mardi, 27 décembre 2016
En Allemagne, le débat s’engage sur l’intensification des mesures de sécurité
Dans un pays rétif à tout ce qui peut s’apparenter à un Etat policier, mais frappé par une série d’attaques terroristes, Angela Merkel a choisi de donner la priorité à la protection des citoyens.
En vingt-quatre heures, le ton d’Angela Merkel a changé. Jeudi 22 décembre, trois jours après l’attentat commis contre un marché de Noël à Berlin qui a fait 12 morts et une cinquantaine de blessés, la chancelière allemande se félicitait des « efforts considérables [ayant été] faits, ces dernières années, pour parer au mieux à la menace terroriste ». Le lendemain, quelques heures après la mort d’Anis Amri – l’auteur de l’attentat, tué à Milan par la police italienne –, elle annonçait que son gouvernement allait « examiner de manière intensive tout ce qui doit être changé dans l’arsenal des mesures dont dispose l’Etat ».
Accusée par l’extrême droite, mais aussi par une partie de sa majorité parlementaire, de ne pas avoir tout fait pour protéger le pays du terrorisme, Angela Merkel a donc décidé de réagir.
Au premier, Thomas de Maizière (démocratie-chrétienne, CDU), elle a demandé d’« analyser chaque aspect du cas Anis Amri », autrement dit une sorte d’audit à l’issue duquel elle n’exclut pas d’éventuels « changements sur le plan politique ou législatif ». Le second, Heiko Maas (Parti social-démocrate, SPD), doit quant à lui annoncer des décisions « très rapidement, en janvier 2017 » pour « mieux surveiller les personnes dangereuses » et « expulser le plus vite possible » celles interdites de séjour en Allemagne – ce qui était le cas d’Amri, dont la demande d’asile avait été refusée en juin.
Agir de la sorte, pour la chancelière, présente un réel intérêt politique. En se contentant d’un engagement assez général sur le renforcement de la sécurité et en confiant à ses ministres le soin de faire des propositions précises, elle évite de s’exposer personnellement, laissant ces derniers en première ligne pour affronter des débats qui promettent d’être vifs.
L’un d’eux a déjà commencé. Il concerne la vidéosurveillance. Mercredi 21 décembre, le gouvernement a présenté un plan prévoyant de l’étendre à un grand nombre de lieux publics, comme les stades et les centres commerciaux, d’autoriser les policiers à porter des minicaméras et de permettre une reconnaissance automatique des visages et des plaques d’immatriculation.
Avalisé deux jours après l’attentat de Berlin mais annoncé au lendemain des violentes attaques commises en juillet en Bavière et dans le Bade-Wurtemberg, dont deux revendiquées par l’organisation Etat islamique (EI), ce plan ne fait pas l’unanimité.
C’est le cas dans la capitale, où la majorité issue des élections de septembre, qui rassemble les sociaux-démocrates, les écologistes et Die Linke (gauche radicale), a déjà exprimé ses réticences. Elle l’a fait savoir par la voix du porte-parole du nouveau ministre de l’intérieur de la ville-Land de Berlin, qui a déclaré, dimanche, que le débat sur le renforcement de la vidéosurveillance était « prématuré ». Une réponse à M. de Maizière qui, dans l’édition dominicale du quotidien Bild, venait précisément de demander aux responsables de l’exécutif berlinois de reconsidérer « en toute urgence » sa position sur le sujet.
Pour l’heure, le gouvernement veut croire qu’il a l’opinion publique avec lui. C’est en tout cas ce que suggère un sondage YouGov-DPA publié ce week-end, selon lequel 60 % des Allemands souhaitent davantage de vidéosurveillance. Reste qu’il s’agit d’une étude réalisée à chaud, avec toutes les réserves méthodologiques qui s’imposent, et que, malgré cela, ce résultat n’est pas un plébiscite. Le reflet d’une société travaillée par les angoisses sécuritaires mais encore marquée par une histoire récente qui la rend rétive à tout ce qui peut s’apparenter à un retour de l’Etat policier.
Thomas Wieder
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Accusée par l’extrême droite, mais aussi par une partie de sa majorité parlementaire, de ne pas avoir tout fait pour protéger le pays du terrorisme, Angela Merkel a donc décidé de réagir.
Intérêt politique
A dix mois des élections législatives de septembre 2017, lors desquelles elle briguera un quatrième mandat de chancelière, elle affirme désormais que la sécurité est la première de ses priorités. « Pour moi et pour l’ensemble du gouvernement, c’est le devoir le plus important de l’Etat que de protéger les citoyens », a-t-elle assuré, vendredi, lors d’une brève déclaration à la presse depuis la chancellerie. Un changement de ton, donc. Mais pas encore de mesures précises pour autant. Pour celles-ci, Angela Merkel s’en remet à ses ministres de l’intérieur et de la justice.
Au premier, Thomas de Maizière (démocratie-chrétienne, CDU), elle a demandé d’« analyser chaque aspect du cas Anis Amri », autrement dit une sorte d’audit à l’issue duquel elle n’exclut pas d’éventuels « changements sur le plan politique ou législatif ». Le second, Heiko Maas (Parti social-démocrate, SPD), doit quant à lui annoncer des décisions « très rapidement, en janvier 2017 » pour « mieux surveiller les personnes dangereuses » et « expulser le plus vite possible » celles interdites de séjour en Allemagne – ce qui était le cas d’Amri, dont la demande d’asile avait été refusée en juin.
Agir de la sorte, pour la chancelière, présente un réel intérêt politique. En se contentant d’un engagement assez général sur le renforcement de la sécurité et en confiant à ses ministres le soin de faire des propositions précises, elle évite de s’exposer personnellement, laissant ces derniers en première ligne pour affronter des débats qui promettent d’être vifs.
Avalisé deux jours après l’attentat de Berlin mais annoncé au lendemain des violentes attaques commises en juillet en Bavière et dans le Bade-Wurtemberg, dont deux revendiquées par l’organisation Etat islamique (EI), ce plan ne fait pas l’unanimité.
C’est le cas dans la capitale, où la majorité issue des élections de septembre, qui rassemble les sociaux-démocrates, les écologistes et Die Linke (gauche radicale), a déjà exprimé ses réticences. Elle l’a fait savoir par la voix du porte-parole du nouveau ministre de l’intérieur de la ville-Land de Berlin, qui a déclaré, dimanche, que le débat sur le renforcement de la vidéosurveillance était « prématuré ». Une réponse à M. de Maizière qui, dans l’édition dominicale du quotidien Bild, venait précisément de demander aux responsables de l’exécutif berlinois de reconsidérer « en toute urgence » sa position sur le sujet.
Pour l’heure, le gouvernement veut croire qu’il a l’opinion publique avec lui. C’est en tout cas ce que suggère un sondage YouGov-DPA publié ce week-end, selon lequel 60 % des Allemands souhaitent davantage de vidéosurveillance. Reste qu’il s’agit d’une étude réalisée à chaud, avec toutes les réserves méthodologiques qui s’imposent, et que, malgré cela, ce résultat n’est pas un plébiscite. Le reflet d’une société travaillée par les angoisses sécuritaires mais encore marquée par une histoire récente qui la rend rétive à tout ce qui peut s’apparenter à un retour de l’Etat policier.
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