C’est sous ce titre que, dans le silence le plus complet des médias français, le journal généraliste algérien, généralement bien informé, El Watan nous apprend, dans son édition du 5 janvier 2017, que « le recteur de la Mosquée de Paris (Dalil Boubakeur) semble davantage préoccupé par l’avenir de son fils, Sami, que par le rôle que requiert son statut en tant que figure de l’islam de France. » De quoi s’agit-il ?
Dans un mail adressé aux services du nouveau Premier ministre, Dalil Boubakeur aurait sollicité une entrevue avec Bernard Cazeneuve pour demander que son fils soit promu au rang de conseiller technique au sein de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII), espérant ainsi faire pression sur cet office. Si cette information est exacte – et il n’y a pas de raison d’en douter car elle n’a pas été contredite -, il s’agit d’une bien curieuse demande, au moment même où la problématique de la montée de l’extrémisme religieux en France inquiète. Dalil Boubakeur aurait même fait du chantage en menaçant de boycotter la réunion de l’instance de dialogue avec l’islam de France du 12 décembre 2016, menace qui n’a toutefois pas été mise à exécution. Matignon, qui n’a pas accédé à sa demande, n’en revient, paraît-il, pas « de son peu d’intérêt pour les choses essentielles ». El Watan nous rapporte que « Bernard Cazeneuve, qui ne souhaite pas aboutir à une rupture avec la Grande Mosquée de Paris, a tenté d’“amadouer” le vieux Boubakeur lors de son discours d’ouverture par des louanges qui n’ont pas été du goût des représentants des autres pays, dont les Marocains et les Turcs ».
Le problème est que la réputation morale de Dalil Boubakeur a déjà été écornée dans le passé à cause de sa grande proximité avec les puissants. En 2007, son fils Sami – déjà lui – avait été nommé à l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations (l’ancêtre de l’OFII) par Brice Hortefeux, dont il a pris la défense en 2009 au moment où il était accusé de propos racistes et xénophobes par ces paroles : « Je témoigne qu’il n’a eu que des paroles de respect et d’aménité pour toute la communauté musulmane de France dans mes contacts avec lui. » Ce qui l’avait fait affubler par Mediapart du sobriquet de « calife au service des puissants ».
Premier président du Conseil français du culte musulman (CFCM) en 2003, Dalil Boubakeur n’a pas su non plus s’imposer à sa tête et imposer cette instance à l’ensemble des musulmans de France. L’unité qui était attendue par les pouvoirs publics n’a pas été au rendez-vous de son mandat et ne l’est toujours pas. À sa décharge, cette tâche était sans doute impossible, tant les courants en son sein sont antagonistes et l’influence d’États étrangers importante. Plus médiatique que visionnaire et progressiste, il a parfois pris des positions intenables et provocatrices, comme son appel en 2015 à doubler le nombre de mosquées en France d’ici deux ans pour pallier le manque de lieux de culte, comme pour se rattraper de son inaction religieuse. La Grande Mosquée de Paris, qui tient une place symbolique importante pour la visibilité de l’islam et des musulmans en France en tant que mosquée mère des mosquées françaises (elle est la plus vieille mosquée en France métropolitaine), n’a pas non plus su ou pu montrer la voie.
Cette information tombe donc mal au moment où les musulmans de France auraient tant besoin d’un guide spirituel ayant une autorité morale et religieuse incontestable, rôle que Dalil Boubakeur ne peut définitivement plus jouer aujourd’hui auprès des pouvoirs publics. Cela ne va pas non plus améliorer son image ainsi que celle de la Grande Mosquée de Paris auprès des autres instances représentatives de l’islam en France et risque de favoriser encore davantage leur morcellement.
Philippe Franceschi
Source
Dans un mail adressé aux services du nouveau Premier ministre, Dalil Boubakeur aurait sollicité une entrevue avec Bernard Cazeneuve pour demander que son fils soit promu au rang de conseiller technique au sein de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII), espérant ainsi faire pression sur cet office. Si cette information est exacte – et il n’y a pas de raison d’en douter car elle n’a pas été contredite -, il s’agit d’une bien curieuse demande, au moment même où la problématique de la montée de l’extrémisme religieux en France inquiète. Dalil Boubakeur aurait même fait du chantage en menaçant de boycotter la réunion de l’instance de dialogue avec l’islam de France du 12 décembre 2016, menace qui n’a toutefois pas été mise à exécution. Matignon, qui n’a pas accédé à sa demande, n’en revient, paraît-il, pas « de son peu d’intérêt pour les choses essentielles ». El Watan nous rapporte que « Bernard Cazeneuve, qui ne souhaite pas aboutir à une rupture avec la Grande Mosquée de Paris, a tenté d’“amadouer” le vieux Boubakeur lors de son discours d’ouverture par des louanges qui n’ont pas été du goût des représentants des autres pays, dont les Marocains et les Turcs ».
Le problème est que la réputation morale de Dalil Boubakeur a déjà été écornée dans le passé à cause de sa grande proximité avec les puissants. En 2007, son fils Sami – déjà lui – avait été nommé à l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations (l’ancêtre de l’OFII) par Brice Hortefeux, dont il a pris la défense en 2009 au moment où il était accusé de propos racistes et xénophobes par ces paroles : « Je témoigne qu’il n’a eu que des paroles de respect et d’aménité pour toute la communauté musulmane de France dans mes contacts avec lui. » Ce qui l’avait fait affubler par Mediapart du sobriquet de « calife au service des puissants ».
Premier président du Conseil français du culte musulman (CFCM) en 2003, Dalil Boubakeur n’a pas su non plus s’imposer à sa tête et imposer cette instance à l’ensemble des musulmans de France. L’unité qui était attendue par les pouvoirs publics n’a pas été au rendez-vous de son mandat et ne l’est toujours pas. À sa décharge, cette tâche était sans doute impossible, tant les courants en son sein sont antagonistes et l’influence d’États étrangers importante. Plus médiatique que visionnaire et progressiste, il a parfois pris des positions intenables et provocatrices, comme son appel en 2015 à doubler le nombre de mosquées en France d’ici deux ans pour pallier le manque de lieux de culte, comme pour se rattraper de son inaction religieuse. La Grande Mosquée de Paris, qui tient une place symbolique importante pour la visibilité de l’islam et des musulmans en France en tant que mosquée mère des mosquées françaises (elle est la plus vieille mosquée en France métropolitaine), n’a pas non plus su ou pu montrer la voie.
Cette information tombe donc mal au moment où les musulmans de France auraient tant besoin d’un guide spirituel ayant une autorité morale et religieuse incontestable, rôle que Dalil Boubakeur ne peut définitivement plus jouer aujourd’hui auprès des pouvoirs publics. Cela ne va pas non plus améliorer son image ainsi que celle de la Grande Mosquée de Paris auprès des autres instances représentatives de l’islam en France et risque de favoriser encore davantage leur morcellement.
Philippe Franceschi
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