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lundi, 06 février 2017

Des policiers déguisés en musulmans pour arrêter des dealers dans les cités !


Afin de s’adapter aux évolutions de la délinquance, la police a toujours dû faire preuve d’imagination et de réactivité. Ainsi, pour faire face aux gangs organisés et motorisés qui se jouaient des forces de sécurité, Georges Clemenceau créa-t-il, en 1907, ces fameuses brigades mobiles, ancêtres de la police judiciaire, qui prirent le nom de « Brigades du Tigre ».

C’est aussi pour s’adapter à un contexte particulier, mais de plus en plus courant, que des policiers d’une brigade spécialisée de la direction de la sécurité publique des Bouches-du-Rhône ont récemment revêtu le kamis et le voile intégral afin de procéder à l’interpellation d’un dealer, dans le XVe arrondissement de Marseille. Cette arrestation a été filmée par un riverain, comme cela est fréquemment le cas, et il semblerait que cette façon de procéder des policiers ait provoqué une polémique, laquelle s’est étendue sur les réseaux sociaux. Cette manière d’agir aurait même entraîné la réaction mitigée d’un syndicaliste policier, l’idée étant que pour agir, certes, il faut se confondre dans la masse, « mais pas jusqu’au bout quand même ». Il est vrai qu’observée, bien au chaud, depuis un bureau parisien, une telle interpellation dans un quartier sensible de Marseille peut susciter des réserves !

Pourtant, au regard du droit, l’opération est parfaitement légale. Il est, en effet, un principe connu de tout enquêteur : celui de loyauté. Ce principe a des origines jurisprudentielles qui remontent au XIXe siècle. 

Il pose la question de savoir dans quelle mesure sont recevables les éléments de preuve (ou d’enquête) issus de pratiques policières reposant sur la ruse et le stratagème. La réponse à cette question, maintes fois tranchée par la Cour de cassation, est maintenant solidement établie. Les pratiques en question ne doivent en aucun cas inciter le mis en cause à passer à l’acte, mais révéler une infraction préexistante. Ancré dans les pratiques policières, ce fondement a même été confirmé par la pointilleuse Cour européenne des droits de l’homme, laquelle admet le procédé, dès lors qu’il n’est pas porté atteinte au libre arbitre des individus concernés.
 
Pour renforcer cette position, des décisions de la chambre criminelle ont établi que « policiers et gendarmes n’ont pas à annoncer préalablement leur qualité ou à porter un uniforme pour constater une infraction ».

Sur le plan juridique, l’interpellation de ce dealer, qui était en possession d’un kilo de cannabis et de 300 euros, lesquels ne provenaient certainement pas de son travail à l’usine, était donc parfaitement « bordée ».

Reste, bien entendu – et c’est plutôt là que l’on entend les réactions outrées -, le fait que la tenue portée par les policiers était musulmane. La nécessité, pour intervenir dans un milieu donné, de se fondre dans un décor ne concerne pas que les quartiers de Marseille. Qu’il s’agisse de la tenue d’employé du gaz, de préposé de La Poste ou de ministre du culte, l’histoire de la police est jalonnée d’affaires qui n’ont pu être résolues que grâce à ces pratiques qui, seules, permettent de pénétrer utilement le milieu de la délinquance. On peut, bien sûr, comprendre que ces stratagèmes puissent troubler une organisation mafieuse qui, jusque-là, était florissante et bénéficiait parfois d’une protection communautaire active ou passive. Mais restons lucides, ce qui est constitutif d’une infraction, c’est de se livrer au trafic de stupéfiants et non de revêtir une tenue traditionnelle, qu’elle soit musulmane ou autre.

Olivier Damien

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