Le parti d’ultradroite AfD a tenté un peu vite de récupérer le drame, non lié à la question des migrants.
Après la retenue observée par la classe politique allemande au lendemain du drame, le temps des propositions politiques semble être arrivé. Mais difficile de tirer les enseignements d’une tuerie de masse dont le caractère hors-norme, tout comme son absence de lien à la fois avec l’islamisme et avec la question des réfugiés, semble avoir rendu un peu vaines les solutions trop simplistes…
Si le ministre fédéral de l’Intérieur, Thomas de Maizière, a estimé qu’il fallait tout faire pour «contrôler plus sévèrement l’accès aux armes», un responsable chrétien-démocrate, Stephan Mayer, notait que «l’Allemagne dispose déjà d’une des législations les plus restrictives en la matière».
Joachim Hermann, le ministre de l’Intérieur bavarois (CSU), a lui évoqué la possibilité d’une intervention de l’armée sur le sol allemand en cas d’attaques terroristes d’envergure, une question hautement sensible en Allemagne. Les alliés sociaux-démocrates sont néanmoins vite venus tempérer ces accents martiaux par le biais de leur secrétaire générale, Katarina Barley: «Ceux qui utilisent cette tragédie pour appeler à davantage de surveillance, de barrières et de militaires instrumentaient les victimes.»
Dans ce contexte sécuritaire précaire, la coalition centriste que dirige Angela Merkel risque-t-elle d’être doublée sur sa droite? Et les multiples inquiétudes déclenchées en moins d’une semaine par deux attaques diamétralement opposées peuvent-elles redonner un peu d’air à une extrême droite en difficulté? L’attaque à la hache de Wurzbourg, dans un train de banlieue (5 blessés), par un réfugié afghan de dix-sept ans semblait ouvrir un boulevard aux voix les plus hostiles à l’égard de la politique migratoire du gouvernement d’Angela Merkel, et en particulier celles du parti Alternative für Deutschland (AfD). Pas sûr néanmoins que le parti en profite.
Leur hâte à tirer les marrons du feu a provoqué une instrumentalisation un peu rapide de la fusillade munichoise. Dès 21 h 06, le responsable des relations de presse du parti, Christian Lüth, lançait sur Twitter: «Votez AfD! Tirs au centre commercial Olympia: des morts à Munich – la police parle de terrorisme.» Depuis, le message a disparu de son compte. Peu après, André Poggenburg, l’une des figures les plus radicales du parti, lançait sur le même canal un cinglant: «Parti unifié de Merkel: merci pour le terrorisme en Allemagne et en Europe!» Des dérapages très calculés dont il est difficile de dire s’ils parviendront à faire gagner des voix à un parti à la peine dans les sondages ces dernières semaines.
Depuis le chaos qui a suivi le Brexit, son message eurosceptique a plus de mal à convaincre. Et le parti se déchire, entre luttes de pouvoir intestines et mises à l’écart d’encombrants élus antisémites. Une chose est sûre: le débat politique consensuel à l’allemande a pris un coup de plus.
Les motivations protéiformes du tueur de Munich
Le jeune Germano-Iranien, qui a tué neuf personnes à Munich, s'est inspiré d'autres tueries de masse.
Il est 5 h 30 à la sortie du métro. Ils sont des centaines à attendre en file indienne l’arrivée du bus 613 qui mène au parc olympique de Barra da Tijuca. La station s’appelle Nova América – Nouvelle Amérique. Tout un symbole pour le Brésil qui affiche, depuis le début des années 1980 et la mise en service de la ligne, des ambitions nouvelles et une économie en plein essor. Tous les matins, c’est le même rituel. Il y a ceux qui attendent le long du mur pour avoir une place assise et ceux qui attendent le long de la route, pour arriver sur le site le plus vite possible. Dans le bus, les visages sont fermés et le silence pesant.
À l’approche du parc olympique, les ouvriers descendent avec la même discipline qu’au départ du bus et rejoignent leur chantier sous le regard de la garde municipale qui surveille les portes d’entrée. Dans douze heures, ils feront le chemin inverse.
Devant les grilles, une vingtaine d’ouvriers est déjà rassemblée. Chaque jour, depuis le mois de mars, ils viennent réclamer l’argent que leur doit la société pour laquelle ils travaillaient: près de 6500 réais (2000 francs). «Au mois de mars, le président de notre entreprise est venu dire à l’ensemble des ouvriers qu’il nous restait vingt jours de travail et qu’après, on devrait tous partir. Dans ce cas, la Ville doit nous payer deux mois de salaire mais nous n’avons rien eu», raconte Adrian.
«Du stress et de la fatigue»
Le Brésil connaît une crise économique historique: en 2015, le Produit intérieur brut a chuté de 3,8% et le chômage a dépassé les 11% des actifs, un record. Le 17 juin, l’Etat de Rio a publié un décret alarmiste dans lequel il déclare l’état de «calamité publique» et autorise «l’adoption de nouvelles propositions destinées à réduire les dépenses» en vue de la réalisation des Jeux. Sur le site Internet G1, considéré comme le principal site d’information du pays, l’économiste Raul Velloso commente: «Le gouvernement doit choisir entre ceux qu’il paie et ceux qu’il ne paie pas.»
Comme la plupart des ouvriers, Adrian se réjouissait d’accueillir les Jeux et de participer à ce «moment historique». Mais «finalement, il n’y a pas de bénéfice pour nous, ni pour les ouvriers ni pour les habitants; ils promettent plein de choses et ils finissent par détourner l’argent vers d’autres choses», déplore-t-il. Avant d’ajouter, «tout ce qu’on a eu nous, c’est du stress et de la fatigue».
Ils sont près de 500, selon eux, à venir chaque jour pour réclamer leur paiement devant les grilles du parc. Une semaine plus tôt, Adrian a bloqué le chantier du vélodrome avec d’autres ouvriers. Les travaux de l’arène sont très en retard. Dans dix jours, elle accueillera les épreuves de cyclisme sur piste et plusieurs installations doivent encore être posées.
«Beaucoup de pression»
Cette précipitation et les retards font partie de l’identité brésilienne; ils seraient presque charmants, s’ils n’étaient pas tragiques. Depuis 2013, onze ouvriers sont morts sur les chantiers des JO. Une équipe de football. Lors des travaux pour la Coupe du monde, en 2014, huit avaient déjà perdu la vie. Sur le seul chantier du métro, trois d’entre eux sont morts: l’un a eu le crâne écrasé par un camion, un a chuté d’un escalier et un autre a été fouetté par un tuyau contenant de l’air comprimé. Et plus l’échéance approche, plus les conditions sont difficiles. «On a beaucoup de pression en raison du peu de temps qu’on a pour terminer les travaux. Avec les ouvriers, tout se passe bien mais avec les chefs de chantier, c’est très compliqué», témoigne Adrian. En mai 2015, dix mille ouvriers ont mené une grève et paralysé les chantiers du stade d’Engenhao et de l’aéroport international pour demander une augmentation des salaires. Inquiète du retard pris par les travaux, la Mairie leur a accordé une hausse de 8%. En échange, une entreprise venait assurer la surveillance des chantiers et vérifier que les ouvriers étaient bien à l’œuvre.
Urgence à construire
Dans ces conditions, les installations sont terminées dans la précipitation et restent fragiles. Lors de la Coupe du monde de football, en 2014, les équipes et journalistes ont été accueillis dans des hôtels à peine présentables. Le 21 avril, c’est une piste cyclable qui s’est effondrée, causant la mort de deux personnes. Inaugurée trois mois plus tôt, la piste faisait partie des travaux de modernisation de la Ville en vue des Jeux olympiques.
L’entreprise chargée des travaux, Concremat, a obtenu plus de cinquante contrats, sans passer par des appels d’offres, au prétexte de l’urgence des constructions. Elle est chargée de six autres chantiers liés aux Jeux olympiques.
Gilles Bouvaist
Source : Tdg.ch